Importance de la période de tarissement pour la poulinière

Publié le par Catherine Kaeffer. Editions Alpha et Oméga

Dans un élevage, il est primordial de maintenir les poulinières en état d’un cycle reproductif sur l’autre afin qu’au fil des années et des poulinages, elles conservent leur santé le plus longtemps possible. Or la gestation comme la lactation imposent à l’organisme des contraintes certes différentes mais conséquentes. Elles impactent directement le temps de repos nécessaire entre deux lactation. Techniques d'élevage fait le point.

En gestation, on a une contrainte faible au niveau énergétique et le plus souvent très bien voire trop bien couverte. Les principales demandes sont un peu au niveau protéique et beaucoup au niveau minéral, puisque le fœtus possède peu de tissus gras et que sa principale synthèse est osseuse. Par contre, on a des contraintes mécaniques très importantes, le poids du poulain étant suspendu à la colonne vertébrale de la mère et non pas supporté par le bassin comme chez la femme.

En lactation, la contrainte principale sur l’organisme est nutritionnelle. La synthèse du lait est prioritaire et de ce fait, elle peut se faire, si nécessaire au détriment de l’organisme maternel. L’image la plus parlante est de se dire qu’une jument allaitante mange d’abord pour produire le lait et ensuite, s’il y a du rab, elle peut se nourrir elle-même. En cas de restriction sur un élément, elle puisera dans ses propres réserves mobilisables : c’est l’autophagie. Elle consommera ses graisses de réserve en cas d’apport énergétique insuffisant, ses muscles en cas de carence protéique. Elle consommera ses os en cas de carences en calcium ou en phosphore.

Ceci étant, les mécanismes adaptatifs ont tous leurs limites. Si les carences sont trop importantes ou portent sur des minéraux qui ne sont pas stockés par l’organisme, la quantité et/ou la composition du lait seront insuffisantes et le poulain en pâtira forcément.

En outre, un nouveau-né est un être fragile. La nature préférera toujours baisser les bras et le sacrifier que de perdre la mère qui est l’avenir. De ce fait, si vraiment la malnutrition est trop importante, on a des phénomènes de résorption en début de gestation ou d’arrêt de la production laitière. Mais si le premier mécanisme se déclenche assez facilement et est donc une vraie sauvegarde pour la santé de la mère, le second est un mécanisme de la dernière chance et pour y arriver, il faut vraiment que la mère soit mal en point.

Pour pouvoir refaire un cycle sans risque, il est donc nécessaire qu’elle ait refait ses réserves avant.

On a 11 mois de gestation. Mais on considère que sur les 5 premiers mois, les besoins nutritionnels ne sont pas différents de ceux d’une jument vide et d’autre part, le poids du poulain et des annexes n’est pas suffisant pour tirer outre mesure sur les structures.

On peut donc dire qu’un cycle c’est 11 mois de gestation dont 6 qui comptent vraiment et x mois de lactation.

Autant les mois de gestation sont déterminés par la nature, autant les mois de lactation sont directement gérés par l’éleveur.

Il peut être tentant pour assurer un départ plus serein dans la vie au poulain, de retarder de quelques mois la date du sevrage surtout si celui-ci pour une raison ou une autre a insuffisamment profité.

Comme la date de la mise-bas suivante s’est jouée bien avant que cette décision intervienne, il est inéluctable que le temps de lactation supplémentaire diminue d’autant la période de tarissement.

Si on est dans le cas d’un poulinage annuel, observons les dépenses énergétiques de la jument selon qu’on fait un sevrage à 6 mois ou un sevrage à 10 mois en supposant bien sûr qu'elle soit saillie derrière la mise-bas. 

Besoins énergétiques d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés
Besoins énergétiques d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés

Besoins énergétiques d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés

Sur les graphiques, on observe que si on fait un sevrage à 6 mois, on a une période où les besoins en énergie sont finalement assez peu différents des besoins d’entretien. L’organisme tourne donc beaucoup moins vite. C’est pour lui un temps de repos, relatif, certes mais réel.

Si on fait un sevrage 10 mois, ce temps de repos n’existe plus et l’organisme tourne à plein régime quasi en continu.

Si on regarde les besoins protéiques, on a le même phénomène mais encore plus marqué.

Besoins protéiques (MADC) d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés
Besoins protéiques (MADC) d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés

Besoins protéiques (MADC) d'une poulinière en fonction de la date du sevrage. Techniques d'élevage (R). Tous droits réservés

A noter que pour ce qui est des minéraux, calcium et phosphore, les courbes sont comparables à celles des protéines.

Un non-respect du temps de tarissement a donc des conséquences proportionnellement plus importantes sur la démusculation et la déminéralisation de la jument que sur ses réserves graisseuses.

Le sevrage 6 mois s’impose donc pour protéger la jument en cas de mise-bas annuelle. On ne peut le différer que si la jument est vide au moment du sevrage.

Catherine Kaeffer

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MAJ novembre 2022

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