Grands espaces et cheval malade
Aujourd’hui, la mode est aux grands prés, aux paddock paradise, à la liberté, à l’espace pour nos chevaux. Le box, l’espace clos et étroit est assimilé à une prison.
La liberté évoque les chevaux sauvages qui parcouraient des distances impressionnantes pour se nourrir, pour boire en usant leurs sabots sur les sols.
Mais la nature est parfois une dure maîtresse. Le cheval qui pour une blessure ou du fait des outrages du temps ne peut plus se déplacer est laissé sur place par le troupeau et meurt rapidement sous la dent des prédateurs ou simplement de faim et encore plus de soif. Le poulain qui n’a pas la force de suivre sa mère est condamné.
Organiser des déplacements importants pour des chevaux en bonne santé est effectivement une excellente chose : maintien d’un exercice physique, moins de problèmes de musculation, de pieds, une meilleure circulation et des chevaux mieux dans leur peau.
On pourrait penser que ces chevaux ayant un style de vie plus naturel, ils imposent moins de contraintes et moins de surveillance au propriétaire puisqu’ils peuvent se débrouiller tout seuls ayant de l’herbe et de l’eau à disposition.
Je dirais que c’est tout le contraire.
Chaque médaille a son revers. Il est beaucoup plus facile de ne pas voir un problème sur un cheval qui est boueux, au fond du pré et plus encore en hiver alors qu’on va parfois nourrir quand il fait noir.
Souvent pour maximiser les distances de déplacement, on met des clôtures et on installe le point d’eau à une extrémité et le point de nourriture à une autre. On a un système dissocié eau / nourriture.
Imaginons maintenant un cheval qui, un peu âgé, commence à faire de l’arthrose. Il se déplace un peu péniblement. Bien sûr le fait de bouger va entretenir ses articulations. Donc en prévention, ce système dissocié lui conviendra bien. Mais si le mal empire, il va limiter ses déplacements. Cela veut dire qu’il n’ira plus boire quand il aura soif mais quand il aura très soif. Il n’ira plus chercher du foin quand il aura faim mais quand il aura très faim. A ce stade, tout se passera comme s’il avait une alimentation et un abreuvement nettement moins bon que ce qu’il a. Son état général va donc se dégrader plus vite.
Plus sournois encore, le cheval un peu faible ou ayant des pieds limites reculera le moment d’aller boire si l’abord de l’abreuvoir est boueux ou au contraire caillouteux.
Or, il est souvent difficile de savoir exactement à quel point en est le cheval d’autant que de façon atavique, ce sont des animaux qui dissimulent leur douleur.
Et pourtant, c’est la veille du jour où il se dira « j’y vais pas, j’ai trop mal », qu’il faudra lui mettre un point d’eau à côté de la nourriture… facile non ?
Vous pouvez d’ailleurs avoir le même phénomène avec des chevaux plus mal en point en stabulation. Dans certains cas, parcourir 3 mètres, c’est trop. Et alors vous allez ajouter la déshydratation au problème de base.
Le seul moyen de vérifier la chose, lorsque vous avez un cheval pas en forme voire carrément malade est de lui proposer de l’eau et de la nourriture à chaque fois que vous le voyez. S’il se jette dessus, il faut absolument, le temps qu’il récupère, lui mettre l’eau et la nourriture littéralement « sous le nez ».
Catherine Kaeffer
Cet article a été rédigé par un membre de l'équipe de Techniques d'élevage. Retrouvez tous nos articles sur http://www.techniquesdelevage.fr ou http://anneetcat.wix.com/techniques-elevage.