Un poulain n’est pas un cheval
Lorsqu’on parle alimentation du cheval, on a de grandes règles sur l’importance du fourrage, l’utilisation des aliments, la nécessité d’un apport minéral complémentaire, etc.
Partout, on parle du « cheval » être mythique, standard, théorique dont l’alimentation pour être « bonne » doit répondre à un certain nombre de critères.
Disons-le tout de go, ce « cheval » n’existe pas souvent. L’animal que vous avez devant vous n’est généralement pas assimilable à ce « cheval » car il a un passé, un état, un âge, un format, un mode de vie qui s’éloigne souvent notablement du cheval théorique.
Cas extrême, lorsque l’on achète un poulain, on voit en lui le « cheval » dont on a toujours rêvé et forcément on applique sur lui ce qui est bon pour un « cheval »… y compris en matière alimentaire.
Mais on ne nourrit pas Sébastien Chabal avec les petits pots de bébé !
Le poulain de 6 mois qui arrive chez vous n’est pas un « cheval ». Il le deviendra un jour mais pour l’instant, c’est un être totalement différent tant dans sa digestion que dans sa physiologie ou son métabolisme.
Le cheval adulte est un herbivore. Ce qui signifie que la majeure partie de son alimentation sera de l’herbe ou ses versions conservées : enrubanné ou foin. Donc des produits riches en fibres, peu digestibles, nécessitant un grand séjour dans le colon pour que la flore ait le temps de le dégrader.
Le poulain est un « lactivore ». La majeure partie de son alimentation à 6 mois, c’est le lait donc un produit où il n’y a pas de fibres, d’origine animale, riche en protéines, très digestible qui va à la fois le nourrir et l’abreuver.
Alimenter un cheval adulte herbivore principalement avec du lait, cela ne vous viendrait pas à l’esprit, non ? Alors pourquoi alimenter un poulain de 6 mois « lactivore » avec du fourrage ? Si dans un sens, cela ne marche pas bien, dans l’autre, cela ne marche pas mieux.
Certes, on sèvre souvent à 6 mois. Mais la programmation génétique ancestrale de l’organisme n’en a rien à faire de nos habitudes actuelles d’élevage… A 6 mois, le poulain, normalement, il lui faut du lait. Alors, c’est possible de sevrer mais dans ce cas, il faut remplacer maman. Donc lui donner un aliment riche en protéines, pauvre en fibres et très digestible. Donc pas un foin ou du moins pas que. A 6 mois, il compte sur un apport de 4 litres de lait par jour si c’est un shetland, 12 litres de lait par jour pour un selle français et de 16 à 18 litres de lait par jour pour un poulain de trait.
Donc si le poulain est sevré, il va lui falloir une quantité correspondante d’apport d’un aliment riche en protéines, très digestible, et pauvre en fibres.
Je dis bien correspondante car évidemment comme dans le lait il y a beaucoup d’eau, et que l’eau de nourrit pas, cela fait beaucoup moins. En général, on considère qu’il faut à un 6 mois de selle pour remplacer les 10-12 litres de lait par jour dont on le prive au moins apporter 2 kg d’aliment poulain. Évidemment, foin et herbe en sus, car il faut qu’il développe son tube digestif pour pouvoir petit à petit se mettre à manger comme un grand.
Car comme on fait une transition pour les bébés, pour les passer du sein de leur mère, éventuellement au biberon, puis au biberon + céréales, puis on introduit les légumes, puis la viande etc. pour que le jeune enfant puisse finalement manger comme papa et maman, de la même façon pour le poulain, il faut une nourriture plus proche du lait au niveau de la composition chimique à 6 mois, qu’à 12 mois, qu’à 18 mois.
A 3-4 mois, lorsque votre poulain grappille de l’herbe ou une bouchée de foin, pour faire comme maman, il faut considérer que, de fait, il ne la digère pas. Elle ne le nourrit pas. Elle est cependant très importante cette bouchée de foin car elle va petit à petit permettre au poulain de mettre en place ses capacités digestives. C’est le bébé qui goûte ½ cuillère à café de carottes. Ce n’est pas cela qui va le nourrir pour sa journée mais cela va petit à petit habituer son tube digestif à traiter ce type d’aliment.
A 18 mois, le poulain digère comme un grand. Mais cela ne veut pas dire qu’il faut l’alimenter comme un grand car il a encore beaucoup de croissance à faire.
Bref, la question « comment on nourrit un cheval ? » exige d’abord de déterminer si on a en face de soi un « cheval » et non une poulinière, un étalon, un trait, un poney, un vieux cheval, un cheval malade ou… un poulain.
Catherine Kaeffer
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