Faut-il donner des mashes ou des barbotages à son cheval ou à son poney ?
On préconise souvent un mash pour rafraîchir les chevaux. On parle de les « détoxifier ». Qu'en est-il vraiment ? Techniques d'élevage fait le point.
En fait, beaucoup de personnes confondent le mash et le barbotage.
Un mash, un vrai, c'est une préparation cuite de céréales, de graines de lin, de son, etc. Après c'est comme le couscous, chaque famille a sa recette !
Dans sa forme classique, le matin on met 2 à 3 litres d'orge, et une poignée de graines de lin dans 5 à 6 litres d'eau que l'on fait bouillir pendant 3 heures. On incorpore ensuite 1 à 1,5 litres de son et on remue fréquemment pendant le refroidissement. On laisse reposer et on distribue le soir.
Question temps de travail, c'est donc plus près du pot au feu que du Royco minute soup !
Parmi les variantes les plus fréquentes, on peut remplacer l'orge par l'avoine ce qui a pour effet de diminuer l'énergie apportée. On peut mettre ou pas le son. On peut y ajouter divers condiments comme la mélasse, le sel, le miel, du bicarbonate de sodium (15 g par animal et par jour pour corriger une éventuelle acidose métabolique et limiter le risque de coups de sang).
Un barbotage est simplement le fait de rajouter de l'eau (en général chaude) à un mélange de céréales et de laisser le tout reposer quelques heures. Là, c'est la soupe en brique.
Entre les deux, vous avez toutes les formules possibles et imaginables.
Cela veut dire aussi que ce qui est commercialisé sous l'appellation « mash » est quelque chose d'autre puisqu'il n'y a pas cuisson mais simplement rajout d'eau. C'est la version plus « moderne » du genre « 1 minute au micro-ondes et vous sortez un plat digne d'un chef ».
La différence peut être cependant minimisée par les traitements industriels des céréales qui hydrolysent aussi l'amidon. Les mauvaises langues pourraient dire que cela ressemble fichtrement à un floconné avec un peu de son ou de graines de lin en plus (mais certains floconnés en contiennent déjà) sur lequel on aurait versé de l'eau... mais évidemment, le prix est souvent à la hauteur de la qualité de l'argumentaire commercial...
L'effet dépend donc du niveau de cuisson. Comme pour nous, la cuisson surtout humide rend l'aliment plus digestible. L'hydratation des grains seule joue à mon avis assez peu sur ce facteur.
Le son comme le lin ont des propriétés émollientes. Le son s'imbibe d'eau et comme il est très riche en cellulose, il facilite le transit. Il forme une masse un peu gélatineuse qui "passe" bien (façon porridge c'est-à-dire flocons d'avoine cuits très différents du simple musli où on rajoute simplement un peu de lait). Au-delà d'une certaine dose (plus de 1 kg à 1,5 kg par cheval) l'effet peut être franchement laxatif.
Le lin qui contient des mucilages a le même type de propriétés. La cuisson à l'eau libère les mucilages et accroît leur efficacité tout en inhibant la formation toxique d'acide cyanhydrique (par destruction de la linase).
Sinon mash et barbotage ont pour fonction de forcer l’abreuvement. Ceci étant, il ne faut pas espérer avec les quelques litres d'eau d'un mash de remplacer les dizaines de litres qu'un cheval doit boire quotidiennement. Cela peut au mieux constituer un plus.
Le but de toute cette tambouille est donc d'apporter un aliment rendu facilement digestible par la cuisson, d'humidifier le contenu digestif du fait des propriétés émollientes (son et lin), donc de faciliter le transit s'il est paresseux et d'apporter du sel et d'autres minéraux pour composer les pertes liées à la sueur et faciliter l'élimination des toxines par le rein.
Il ressort donc que le mash est indiqué pour des chevaux effectuant un travail intense, dont la ration habituelle est à la hauteur donc très riche en concentrés. Il doit compenser les pertes de minéraux par la sueur et faciliter l'élimination rénale des déchets liés à l'exercice.
Un bémol mais de taille : si cela marche si bien pour les chevaux « brûlés à l'avoine », c'est que c'est une préparation souvent nettement moins nutritive qu'une alimentation normale. C'est pour cela que c'est très utilisé sur les chevaux de course les jours de repos, cela permet de baisser la ration tout en donnant du plaisir au cheval et éviter ainsi les coups de sang.
Mais le donner à un vieux cheval dénutri si par ailleurs il mange correctement sa ration ou pire à un jeune poulain en pleine croissance ou à une jument en pleine lactation, c'est illogique.
C'est donc une préparation qui selon sa réalisation oscille entre hygiénique et « thérapeutique ». Elle doit correspondre à une analyse de la situation et n'être utilisée que pour les chevaux « à risques ».
Si elle doit être distribuée régulièrement, il faut donc le faire le jour de repos du cheval et évidemment en tenir compte pour offrir une alimentation un choua plus riche les autres jours.
Cas particulier, comme ils sont très appétents (surtout si on ajoute des condiments), ils sont bien adaptés à des chevaux qui ont du mal à manger leur ration (convalescents, chevaux âgés). Mais cela ne doit être que très transitoire, quelques jours le temps de rétablir un transit, de leur redonner l'habitude de manger. Mais rapidement, il faudra passer à quelque chose de plus nutritif pour éviter un amaigrissement.
Dans de rares cas, on peut distribuer une « soupe » (le plus souvent non cuite donc sous forme de barbotage) de façon régulière en utilisant une ration normale comme produit de base. Il s'agit à ce moment-là d'une simple présentation différente de l'aliment. Cela peut être très adapté pour les chevaux ayant des problèmes de dents, des difficultés de déglutition ou de graves problèmes respiratoires. Il faut cependant une hygiène rigoureuse.
Exemple d'utilisation d'un mash « tout prêt » :
(Merci à l'amie FB qui m'a communiqué les données de ce calcul).
Il s'agit d'une écurie de concours complet où les chevaux reçoivent 2 repas par jour de floconnés. Un repas par semaine, ce floconné est remplacé par un mash industriel. Voyons quelle conséquence ce remplacement a sur les apports nutritionnels des chevaux.
Les quantités moyennes distribuées sont celles préconisées par le fabricant. Un apport de foin complémentaire est effectué. La ration de base est supposée équilibrée.
Apport d'un repas
|
UFC |
MADC (g) |
CB (g) |
Ca (g) |
P (g) |
Mg(g) |
Zn (mg) |
Cu (mg) |
Normal |
2,3 |
238 |
263 |
20,0 |
12,5 |
65,0 |
160,0 |
75,0 |
Mash |
2,1 |
135 |
126 |
2,3 |
6,3 |
2,7 |
45,0 |
21,6 |
Sigles : UFC = Unité fourragère cheval (énergie) ; MADC = matière azotée cheval (azote sous forme de protéines ou non) ; CB = cellulose brute (fibres) ; Ca = calcium ; P = phosphore ; Mg = magnésium ; Zn = zinc ; Cu = cuivre ;
Conclusions :
Le repas mash est seulement 10 % moins énergétique qu'un repas normal ce qui paraît peu. Les normes préconisent une baisse de 35 % de l'apport en énergie pour un cheval de compétition ou de course lors de sa journée de repos hebdomadaire. A noter que cette énergie est apportée davantage par des lipides que par de l'amidon ce qui est favorable à la prévention des dysmicrobismes et des pathologies qui peuvent en résulter comme les coliques ou les fourbures.
Par contre, il contient 43 % de moins de protéines, alors que les normes prévoient une chute quasi proportionnelle à celle de l'énergie (32 %). Cela amène le mash à un rapport MADC/UFC de 64 g ce qui est très faible mais sera vraisemblablement compensé par le foin.
La chute des besoins en Ca, P et Mg est généralement estimée entre 45 et 50 %. Mais dans ce type de ration, il n'y a que le P qui se tient dans ces chiffres. Pour le Ca et le Mg, ce sont des descentes réellement vertigineuses (et j'ai vérifié les chiffres !)
Il faut rappeler qu'une transpiration abondante entraîne une chute des taux sanguins de calcium et de magnésium notamment alors que le phosphore tend lui à augmenter. Ce mash ne permet donc pas de compenser les pertes de ces composés.
Les apports en oligo-éléments sont considérablement réduits et peuvent amener à ne plus couvrir les besoins quotidiens du cheval. Il faut donc que les apports des autres jours soient calculés en fonction de nombre de repas de mash par semaine, pour compenser.
Catherine Kaeffer
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MAJ août 2023