Métabolisme : âne et cheval, pas le même combat.
Voici les paramètres biochimiques de l'âne par comparaison au cheval.
Ces chiffres sont intéressants en soi notamment pour déterminer si une analyse est dans la normale ou pas. Mais ils peuvent aussi amener quelques éléments de réflexion sur leur signification :
Paramètres / espèces |
Cheval (valeurs normales) |
Âne (moyenne sur 32 ânes) |
Urée (g/L) |
0.104-0.25 |
0.36 |
Créatinine (mg/L) |
8.71-19.8 |
9.9 |
ASAT |
116-287 |
240 |
GGT |
2.7-22 |
31 |
Bilirubine (mg/L) |
3-30 |
1.7 |
Les chiffres sont très intéressants :
-
La bilirubine est basse : elle est produite lors de la mort des globules rouges, cette faible concentration peut être due à la faible quantité de globules rouges et peut-être aussi à une bonne élimination rénale.
-
L'urée est étonnante : dans une autre étude, les valeurs normales indiquées sont équivalentes entre le cheval et l'âne...
Or, l'urée entre dans le cycle de l'azote. Elle augmente avec la quantité d'azote ingérée. Une partie de l'urée présente dans le sang est « excrétée » dans le tube digestif où elle est utilisée par les micro-organismes pour la synthèse de leurs propres protéines. Le cheval récupérera ensuite une partie de ces protéines pour lui.
Ce recyclage de l'urée est donc un mécanisme d'épargne qui permet à l'animal de mieux tirer partie de l'azote alimentaire lorsque la ration est pauvre.
L'âne est un animal économe qui utilise au mieux sa ration. Il suffit que les animaux de l'étude présentée aient reçu une alimentation riche en azote (par exemple, qu'ils soient dans un bon pâturage avec de l'herbe jeune) pour que la teneur en urée de leur sang monte dans des proportions notables.
Ces animaux étaient « cliniquement sains », il semble donc que cette teneur sanguine élevée en urée ne les gênait pas, surtout s'il s'agit d'une durée limitée. Par contre, si l'alimentation riche se maintient ou pire si elle devient encore un peu plus riche, on pourrait arriver plus facilement que chez le cheval à des toxicités.
-
L'ASAT et le GGT sont deux enzymes du foie. Pour l'ASAT, l'âne est en moyenne dans la fourchette haute par rapport au cheval. Par contre, pour GGT, la moyenne des ânes est totalement en dehors de la normale des chevaux. Cela peut signifier soit qu'il y a plus d'enzyme, soit qu'elle est plus active chez l'âne.
En médecine humaine, l'augmentation de ces enzymes est signe d'alcoolisme chronique. Or comme on suppose que les ânes ne se sifflent pas du pastis en douce, on peut supposer que l'activité du foie doit être plus importante chez l'âne. Ce point serait néanmoins à vérifier.
Ces différences métaboliques pourraient expliquer des réactions très différentes à certains médicaments entre l'âne et le cheval.
François Kaeffer
Cet article a été rédigé par un membre de l'équipe de Techniques d'élevage. Retrouvez tous nos articles sur http://www.techniquesdelevage.fr ou http://anneetcat.wix.com/techniques-elevage.