Utiliser du sainfoin dans l’alimentation du cheval

Publié le par Catherine Kaeffer. Editions Alpha et Omega

La méfiance actuelle, surtout dans le monde du cheval, vis-à-vis de l’agro-business, a amené nombre de personnes à se tourner vers des espèces fourragères moins connues supposées « moins trafiquées » ou « plus naturelles ».

Comme on a une résurgence des légumes oubliées, on voit réapparaître des cultures devenues anecdotiques ce qui est excellent pour la biodiversité. Mais sur le plan de l’utilisation de ces produits, on manque souvent de renseignements. Ainsi en est-il du sainfoin.

Le sainfoin est une légumineuse vivace de 40 à 80 cm avec des tiges dressées, des inflorescences en grappe de 40 à 60 fleurs roses et des gousses ornées de crêtes épineuses et contenant une graine brunâtre.

Le simple fait que ce soit une légumineuse indique qu’il tire son azote de l’air et donc qu’il n’est pas dépendant de l’apport de fertilisants azotés. En association avec des graminées, il leur fournit un complément d’azote.

Sa teneur en matières azotées totales (MAT) décroît de 18,4 % début bourgeonnement à 13,3 % en fin de floraison. Il est donc sur ce point tout à fait comparable à un trèfle violet ou à une luzerne.

Le sainfoin tolère la chaleur et les sols calcaires, par contre, il déteste les sols lourds acides et trop humides.

Le sainfoin est réservé aux prairies de courte durée (1 à 3 ans). Il a une forte production au printemps avec une plante riche en eau (13,0 % de matière sèche) et pauvre en cellulose brute (16,0 %).

Sa valeur énergétique est estimée pour les ruminants à 0,13 UFL ou 0,13 UFV/kg brut en début bourgeonnement et à 0,15 UFL ou 0,13 UFV en fin floraison. Pour les chevaux, l’équation INRA donne 0,07 UFC/kg en début bourgeonnement et 0,09/kg en fin floraison.

Remarque : on constate ici la différence d’efficacité digestive entre un ruminant et un cheval !

Pour les MADC, on est à 14,1 g MADC/kg et 17,9 g MADC/kg respectivement.

En ce qui concerne la qualité des protéines, la teneur en lysine digestible (par un ruminant) est de 0,9 g/kg et 1,28 g/kg respectivement. Si on retient ce chiffre pour l’alimentation d’un cheval, on a une marge de sécurité puisque dans cette espèce les besoins comme les apports sont exprimés à lysine totale.

En ce qui concerne les minéraux, on retrouve des rapports phosphocalciques élevés mais moins importants que chez la luzerne puisqu’ils sont de l’ordre de 3,1 à 3,3. Ceci étant, de tels rapport interdisent l’utilisation du sainfoin comme seule source de fourrage dans les régimes sans apport de céréales.

En résumé, pour tous ceux que les chiffres rebutent, je dirais que le sainfoin en culture pure ne doit pas être donné en pâturage à des chevaux à cause du risque de problèmes digestifs même si ce n’est pas une légumineuse météorisante.

En association avec au moins 50 % de graminées, c’est à réserver à des chevaux exigeant un rapport protidoénergétique élévé (rapport entre les protéines et l’énergie), c’est-à-dire, essentiellement les juments en fin de gestation ou en lactation et les jeunes chevaux de moins de 2 –3 ans. Une adaptation progressive et une transition prudente sont nécessaires.

Dans ce cas, il est indispensable que le régime comporte aussi une part importante de céréales non supplémentées en minéraux. En effet, si vous avez un aliment industriel, le fabricant a généralement rectifié le rapport calcium/phosphore en rajoutant du calcium partant du principe qu’il serait donné avec un foin ou un pré essentiellement de graminées.

Or, vous, vous utilisez un apport important en légumineuses, donc vous êtes dans une situation différente.

Pour la même raison, vous devrez choisir avec le plus grand soin, le CMV que vous mettrez derrière. En effet, les CMV élevage sont souvent (mais pas toujours) riches en calcium

C’est tout l’intérêt d’avoir une situation originale, les solutions conçues pour le plus grand nombre ne marchent plus…

Donc, on se retrouve dans un cas de figure très particulier : poulinière ou poulain, avec un apport de céréales maison relativement important et avec un CMV ad hoc. Dans ce cas, à condition de faire attention à la transition, le sainfoin en mélange peut être tout à fait intéressant et apporter des protéines permettant d’éviter l’utilisation d’un tourteau de soja par exemple.

Mais si vous avez un cheval adulte qui travaille une fois par semaine, vous oubliez…

Catherine Kaeffer

Découvrez le poster Les minéraux chez les équidés réalisé par TE : métabolisme, excès, carences…
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MAJ Août 2021

Sainfoin. Copyright : Keith Edkins

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Keith Edkins [CC BY-SA 2.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0)], via Wikimedia Commons

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