Comment l’organisme de mon poney réagit-il à une restriction alimentaire ?
On connaît tous le poney ou le cheval de race rustique qui grossit en suçant des cailloux. On sait tous combien il peut être difficile de lui faire perdre un peu de poids alors qu’il gonfle façon montgolfière dès que l’herbe est plus abondante.
En conditions naturelles, dans nos contrées tempérées, un cheval a à faire face à des fluctuations de température et de disponibilité de la nourriture.
En été, il a des températures suffisamment douces pour ne pas avoir besoin de dépenser de l’énergie pour produire de la chaleur. En outre, l’herbe est abondante sur la période. A noter qu’on peut avoir plus au sud des périodes estivales très chaudes où le cheval devra dépenser de l’énergie pour se refroidir et d’autre part où on aura un arrêt de la pousse de l’herbe du fait de la sécheresse.
En hiver, du fait des températures faibles, le cheval devra utiliser de l’énergie à se chauffer. En outre, l’herbe, de moins en moins abondante au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans l’hiver et peu nutritive lui apporte peu de calories.
Il a été démontré que les poneys et chevaux rustiques sont capables de diminuer leurs besoins énergétiques en cas de diminution de la quantité d’aliments disponibles. Ils mettent en place une série de réponses à la fois physiologiques et comportementales afin d’assurer leur survie en cas de disette prolongée.
Si on compare des animaux recevant une alimentation pauvre par rapport à des animaux nourris suivant leurs besoins, on constate :
- des déplacements et des mouvements spontanés moins importants,
- un allongement des temps de repos couchés,
- un ralentissement de l’activité métabolique de l’organisme,
- une baisse de la température de surface de la peau,
- une chute plus marquée de la température corporelle durant la nuit, avec ralentissement des synthèses,
- une baisse de la consommation en eau
- une consommation des réserves corporelles portant aussi bien sur le muscle que sur la graisse
- chez les poulains, on observe un ralentissement voire un arrêt complet de la croissance,
- chez les adultes, les fonctions reproductrices ralentissent ou s’arrêtent.
Les besoins en énergie peuvent ainsi sur des poneys shetland être réduits de 26 % si vous faites une restriction à 60 % des besoins normaux. Cela signifie qu’au lieu d’avoir une perte de poids correspondant à 40 % des besoins comme vous l’attendiez, vous n’aurez une perte de poids qu’au niveau correspondant à 14 % des besoins.
Si vous souhaitez faire maigrir un poney, il faut éviter le plus possible de déclencher ces réflexes ancestraux de survie. Cela signifie qu’il faut avoir une restriction énergétique réelle mais suffisamment modérée pour que l’organisme ne se croie pas en péril et ne réagisse pas.
Supposons une petite restriction de l’ordre de 10 % des besoins énergétiques et avec des besoins protéiques couverts. Vous avez toutes les chances de ne pas enclencher les mécanismes de survie et donc d’obtenir réellement la perte attendue. Comme vous apportez assez de protéines, vous pouvez même avoir une perte plutôt sur les masses graisseuses en maintenant les masses musculaires.
Si vous passez à une restriction de 20 %, vous avez beaucoup plus de chances de mettre en place des mécanismes d’économie et donc d’avoir un effet moindre qu’avec votre restriction de 10 %.
Sans compter que dans ce cas, le plus souvent, on met le poney en paddock sans herbe et donc on restreint ses mouvements…
C’est ainsi qu’on peut entrer dans la spirale infernale des régimes de plus en plus restrictifs, délétères pour la santé du poney (surtout si se faisant on le carence en outre en minéraux ce qui est le plus souvent le cas).
Et bien sûr, si vous ramenez un tel poney à une alimentation normale, comme les mécanismes de survie ne disparaîtront pas du jour au lendemain, vous aurez un poney qui reprendra le poids perdu et même encore plus.
Même sur les poneys, le régime yo-yo, cela existe !
Quelques autres conséquences de ce phénomène adaptatif :
On dit souvent que les chevaux rustiques sont mous en hiver et on attribue cela au poil d’hiver qui les fatigue et les fait transpirer à l’effort ou bien à leurs conditions de vie. En fait, ils sont seulement en mode éco.
Les températures froides ne sont pas à elles-seules suffisantes pour déclencher le phénomène. C’est la combinaison restriction alimentaire + température (voire restriction alimentaire seule) qui le fait. Donc si vous souhaitez que votre cheval travaille hiver comme été, il faut rester à des niveaux d’apport identiques.
Sur des jeunes chevaux, l’arrêt de la croissance a des conséquences sur le long terme s’il est maintenu plus de quelques mois. Mais au moment où il se produit, le poulain est « normal » et rien n’apparaît puisqu’il s’agit d’un phénomène adaptatif naturel. Au moment où on voit les premiers signes, c’est déjà bien tard.
En cas de pathologie, vous pouvez avoir une restriction alimentaire très importante et brutale. Si elle ne se prolonge pas, cela pose peu de problèmes. Mais si elle doit se prolonger parce que la guérison du cheval tarde, vous allez avoir mise en place de ces mécanismes d’autant que le cheval est souvent confiné. Or, le ralentissement des synthèses et la chute de la température corporelle n’est pas favorable à la lutte contre une maladie ou à une cicatrisation.
Catherine Kaeffer
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