Faire maigrir un cheval, un poney ou un âne obèse : les bases du raisonnement

Publié le par Catherine Kaeffer. Alpha & Oméga

Le diagnostic est tombé : il est trop gros. Il risque (dans le désordre) : des coliques, des problèmes musculaires, des coups de chaleur, des traumatismes des articulations et des tendons, une baisse de la fertilité, un syndrome de Cushing, une fourbure… entre autres.

Bref, c’est un cas de force majeure.

La question se pose alors de savoir si vous choisissez l’option « maigrissez de 10 kg en 15 jours pour être la plus belle sur la plage » ou alors la version « qui va piano va sano » plus progressive.

L’option rapide qui fait tous les ans la joie (et le chiffre d’affaires) des magazines féminins n’est pas sans danger… pour le cheval en tous cas.

Devant cette situation de quasi-famine, l’organisme n’a comme solution que de mobiliser en masse des graisses qui pourront être utilisées par le foie pour produire du glucose.

Le foie débordé est alors infiltré par les graisses. Des triglycérides sont relargués en quantités trop importantes dans la circulation et vont se déposer dans d’autres organes comme les reins et le cœur… qui du coup marcheront forcément moins bien.

Dans un premier temps, le propriétaire est relativement content parce que l’animal n’a plus faim et donc l’amaigrissement peut être vraiment très rapide. Mais les autres symptômes sont moins réjouissants : abattement, diarrhée, faiblesse musculaire… Le pronostic est très sombre : 75 % de mortalité en moins de 21 jours.

Les chevaux de grande taille sont moins sujets à ce type de problèmes que les poneys et les ânes. Et comme ce sont chez ces animaux qu’on voit le plus souvent des sujets obèses, cela ne facilite pas les choses.

Le seul cas où cette option est acceptable est celui de la fourbure déclarée. L’urgence est alors tellement grande et la nécessité de diminuer à tout prix le poids de l’animal tellement prégnante, que le risque d’hyperlipémie devient plus secondaire… à la guerre comme à la guerre.

Bref, l’option n° 2 progressive est à privilégier.

Sur un cheval de 500 kg, on peut espérer obtenir une baisse de poids de 25 kg en 30 jours si la ration est à 40 % du besoin d’entretien, en 60 jours si la ration est à 70 % du besoin d’entretien et en 90 jours si elle est à 85 %. Cela correspond à 0,5 de moins sur la note d’état corporel (notation française de 0 à 5 soit 0,25 sur la notation américaine de 0 à 10).

Cependant, je pense qu’il est raisonnable de ne pas faire une restriction énergétique de plus de 10 à 15 %. Ce qui correspond à l’idée qu’il faut prévoir environ 3 mois pour descendre de 5 % du poids vif sans risque.

D’autre part, il est souhaitable d’avoir un poids de la ration qui reste supérieur ou égal à 1,5 % du poids de l’animal pour éviter tout désordre digestif. Soit 7,5 kg pour un cheval de 500 kg et 4,5 kg pour un poney de 300 kg.

Cela veut donc dire qu’il faut à la fois ramener les quantités ingérées vers ce chiffre et d’autre part, diminuer la densité énergétique de la ration (UFC/kg).

Un problème particulier se pose pour les animaux au pâturage dont il est impossible d’estimer les quantités ingérées avec un semblant de précision. Quelques méthodes ont été mises en place sur les bovins ou les ovins mais pas sur le cheval à notre connaissance. Et de toutes façons, elles restent des instruments de recherche et non d’utilisation normale.

Cela veut dire que la solution la plus simple consiste à mettre le cheval « hors sol » ce qui peut poser des problèmes pratiques.

L’autre solution consiste à lui faire porter un panier pendant une partie de la journée ce qui est bien toléré à condition cependant de le rembourrer au niveau du nez pour éviter que le frottement ne le blesse. Si l’on considère que le cheval mange durant 10 à 12 heures en moyenne au pâturage, il faudrait qu’il porte le panier pendant 15 heures par jour pour obtenir une bonne réduction énergétique.

L’avantage du système pré + panier est que les déplacements sont libres… c’est toujours ça de brûlé !

La dernière solution consiste à limiter de façon drastique la surface avec trois bémols :

1. Cela nécessite l’utilisation d’une clôture mobile suffisamment dissuasive pour un animal dont l’estomac gargouille

2. Ventre affamé n’ayant point d’oreilles, il peut être amené à consommer des plantes qu’il refuserait à juste titre en temps normal.

3. Attendez-vous à voir le sol complètement défoncé et à avoir des problèmes pour la repousse de l’herbe.

Il peut aussi être rentré dans une stabulation ou un paddock sans nourriture pendant une partie de la journée.

Il est préférable évidemment de faire 2 fois 7 heures de jeune car 15 heures sans aucune nourriture n’est pas favorable à une bonne digestion. Fractionner plus serait encore mieux mais se heurte aux contraintes pratiques. L’idéal serait de ne pas dépasser 4 heures de jeune.

La meilleure solution est donc, autant que faire se peut de passer l’animal totalement à un régime de fourrage conservé. Comme les quantités sont réduites, une solution consiste à distribuer paille et foin en filet voire de les mettre dans un double filet pour que le cheval soit obligé de les prendre quasi brin par brin ce qui lui permettra d’avoir une durée de prise alimentaire correcte.

Tout cela est très théorique, me direz-vous… alors je vous donne rendez-vous dans un prochain article pour vous présenter un exemple de calcul pratique.

Catherine Kaeffer

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Poney shetland trop rond. Techniques d'élevage. Tous droits réservés

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