Le casse-tête des effets indésirables
Le terme même de médicament nous renvoie à une idée de guérison, de soulagement. Et pourtant... Il suffit d'ouvrir le Dorosz, le Vidal ou le DMV et de regarder les effets indésirables, les contre-indications, les interactions médicamenteuses et les précautions d'emploi.
Ici, nous ne nous préoccuperons que d'un seul fait : le médicament n'ayant aucun effet indésirable n'existe pas !
Pourquoi ?
Reprenons ce qui fait la base du médicament : le principe actif. C'est une molécule ayant une action biologique. Pour cela, il faut que notre principe actif soit capable de se fixer sur des récepteurs ou sur des enzymes. Notez le « des » qui est capital pour le sujet qui nous occupe.
Il existe beaucoup de récepteurs : α et β-adrénergique (récepteurs de l'adrénaline et de la noradrénaline), muscariniques et nicotiniques (récepteurs de l'acétyl choline), histaminergiques (récepteurs de l'histamine), dopaminergiques (récepteurs de la dopamine), récepteurs à la cortisol, les récepteurs μ, σ et κ (récepteurs de la substance P, utilisés par les morphiniques)...
Sans compter que pour un type de récepteur, il existe des sous-types de récepteurs, chacun réparti dans un ou plusieurs organes. Ce qui n'arrange pas nos affaires, loin de là !
Par exemple :
Les anti-inflammatoires stéroïdiens agissent sur les récepteurs aux glucocorticoïdes entraînant l'immunodépression et l'effet anti-inflammatoire souhaités.
Mais ils agissent aussi au niveau de l'hypothalamus avec une diminution du taux de TSH limitant du même coup l'activité de la thyroïde. Il faut savoir que la thyroïde régule tous les métabolismes (lipides, protéines et glucides). Cela explique les effets secondaires à long terme de ces molécules (avec la « bosse du bison » par exemple, due à une répartition différente des graisses).
De plus, certains récepteurs sont dans la cellule, d'autres sont à l'extérieur. Donc certains sont directement accessibles alors que ceux à l'intérieur exigent des propriétés particulières de la substance active pour entrer dans la cellule. Mais ceci n'est qu'un détail... Primordial pour les chercheurs mais pas pour nous en cet instant.
Nous en avons fini (et assez d'ailleurs...) avec les récepteurs. Passons au point suivant.
Il faut savoir que plusieurs molécules naturelles de l'organisme possèdent une voie de production commune donc elles ont des structures assez proches.
Lors de la synthèse du principe actif, on recherche une structure pouvant agir sur un récepteur. Mais cela ne veut en aucun cas dire qu'elle n'agira pas sur d'autres récepteurs proches. Si les conditions pour la fixation sur un récepteur sont remplies alors la liaison est possible. Évidemment, les molécules vont avoir une liaison privilégiée avec un récepteur mais c'est loin d'être exclusif.
En un mot comme en cent, la complexité du système induit forcément des interférences : l'ajout d'une molécule ayant une structure plus ou moins proche de la molécule de base avec un choix de récepteurs à donner des vertiges !
Bon... On s'est « bien amusé » avec des connaissances pharmacologiques maintenant nous sommes face à des animaux.
Certains produits produisent des effets indésirables que chez certaines espèces voire spécifiques d'une espèce.
Un exemple :
Le phoxim est utilisé chez de très nombreuses espèces (chien, cheval, bovin, porc, chameau, buffle, lapin, mouton et chèvre) sur la peau contre les acariens, les poux... et même la mouche plate. Un effet indésirable est la neurotoxicité chez le chat d'où la contre-indication d'utilisation chez cet animal.
Question : pourquoi seulement le chat ?
La molécule est un organophosphoré, ce genre de molécule a été utilisé dans l'armée comme produit chimique neurotoxique.A priori, il devrait être neurotoxique pour tous... Alors le chat a donc une particularité que les autres n'ont pas.
C'est la toilette ! Le chat est le seul a faire sa toilette et donc tout produit chimique se retrouvant sur sa peau risque d'être ingéré, ce qui provoque cette toxicité « spécifique ».
C'est un exemple parmi tant d'autres !
On peut en conclure que les effets indésirables sont aussi bien liés à des données pharmacologiques (récepteurs, métabolites...) qu'à des particularités (comportementales, physiologiques, métaboliques...). Il faut avoir, comme toujours, une vision d'ensemble !
François