Convient à tous les chevaux ?

Cette expression est courante dans les argumentaires commerciaux des aliments comme des compléments pour chevaux. Elle est là pour rassurer. Elle vous affirme que comme votre cheval est… un cheval alors forcément cet aliment lui conviendra.

Parfois, on note une légère restriction : « convient à tous les chevaux de loisir ».

Mais le plus souvent aucune n’est mentionnée : « Une formule de base qui convient à tous les chevaux ».

Et comme si affirmer que cela convient à tous les chevaux n’était pas encore assez général, on peut encore élargir : « Convient à tous les chevaux et tous les types de rations ».

Seulement voilà, croire qu’un aliment peut convenir « à tous les chevaux », c’est au pire croire au Père Noël et au mieux confondre le tee-shirt informe à taille unique avec de la haute couture.

Car chaque cheval a ses caractéristiques. Si un aliment convient à un adulte, il ne saurait en aucun cas convenir à un poulain car ce qui faut à l’un et à l’autre n’est tout simplement pas compatible.

Autrement dit, l’aliment qui convient à tous les chevaux n’existe pas parce qu’il ne peut pas exister.

On en arrive même parfois est des affirmations encore plus étonnantes : « Aliment hautement digestible, convient à tous les chevaux ». Sans vouloir mettre aucunement en doute les qualités de l’aliment en question, cette affirmation sous-tend que si un aliment est hautement digestible, alors il convient à tous les chevaux. Même ceux qui ont justement besoin d’un régime pauvre ? Même le shet qui se la coule douce dans son pré ? A l’évidence non.

Parfois, les affirmations confinent à l’absurde : « convient à tous les chevaux ayant des besoins spécifiques ou ayant eu des carences ».

Un cheval qui a des besoins spécifiques n’a donc pas ceux des chevaux de même type du fait d’un problème ou d’une sensibilité particulière, d’un passé particulier, de carences qui lui sont propres. La logique amène à penser qu’il lui faut une alimentation spécialement adaptée pour lui.

Mais elle ne conviendra pas forcément à un autre cheval qui aussi besoin d’une alimentation spécifique, qui a un problème mais pas le même, un passé mais pas le même, des carences mais pas les mêmes. Et donc qui aura besoin d’une alimentation spécifique certes mais pas la même.

Or là, on affirme qu’un aliment conviendra à tous les cas particuliers. C’est totalement antinomique puisque justement les cas particuliers sont… particuliers.

Cette affirmation est d’autant plus courante qu’elle marche. En effet, son côté rassurant fait qu’elle n’est que très rarement considérée pour ce qu’elle est c'est-à-dire une para-vérité, une vérité Canada Dry… cela a le goût de la vérité, l’emballage de la vérité mais ce n’est pas la vérité… rien qu’une affirmation vague, un discours creux qui ne signifie pas grand-chose.

Alors vous allez vous demander pourquoi j’ai écrit cet article qui, il faut bien l’avouer, ressemble un tantinet à un billet d’humeur alors que depuis des années, je vois tous les jours des aliments, des compléments qui n’ont rien de commun mais qui tous « conviennent à tous les chevaux ».

Et bien c’est parce que récemment, j’ai trouvé mieux : « Aliment minéral pour les bovins, les ovins, les caprins, les chevaux et le gibier ». Et oui, pourquoi pas ? On n’arrête pas le progrès. D'ailleurs ne dit-on pas qui peut le plus peut le moins ? Chevaux, sangliers et bécasses, même combat !

Catherine Kaeffer

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