Aveuglement volontaire
C'est un grand cheval, un bon sauteur. Il a 5 ans quand il commence à tousser au travail, puis au box. Le galop devient poussif, mais le cheval est généreux, il saute toujours aussi haut...
Sa propriétaire s'inquiète, elle demande un examen au vétérinaire. Le diagnostic tombe : emphysème pulmonaire chronique.
Cette maladie provoque la perte progressive des capacités respiratoires du cheval et est incurable. Pour le cheval, toute poussière est interdite et des soins sont prescrits.
Des dispositions sont prises : infusions, fumigations, changement de la litière, injections, époussetage et mouillage du foin, travail en carrière ou en manège mouillé... tout est bon pour aider le compétiteur.
Le temps passe, les performances du cheval diminuent... pas celles de la propriétaire. Elle n'a pas les moyens d'entretenir deux chevaux.
Parents, moniteurs... tous lui conseillent de vendre ce cheval pour en prendre un qui ne la bloquera pas dans sa progression. Elle hésite, cela la déchire de devoir le vendre.
Finalement, le moniteur lui trouve un cheval chez un marchand de chevaux. Celui-ci propose un échange. La propriétaire cède, elle n'aura ainsi pas besoin de prendre la décision.
Le rendez-vous est pris pour la fin de la semaine.
Quand elle m'en parle, je lui pose la question suivante :
- Que veux-tu que le marchand fasse d'un cheval emphysémateux ?
Dans ses yeux, je lis la réponse à ma question. Pour nous deux, c'est évident, mais elle me répond :
- Je ne veux pas y penser...
Elle flatte l'encolure de son cheval, les larmes aux yeux, elle vient de le condamner...
A bientôt
Anne