Une boiterie peut en cacher une autre : la boiterie de compensation

Publié le par Catherine Kaeffer. Alpha et Oméga

Votre cheval boite. Parfois, la cause est évidente : il s’est pris un coup, il est blessé, il a un problème de pied… bref, aucun doute sur l’origine, on traite le membre et si nécessaire on appelle son vétérinaire ou son maréchal favori et le tour est joué.

Mais il y a le spécialiste de la boiterie, le cheval toujours un peu raidouille, le récidiviste, le qu’on soigne depuis des lustres, qui a des hauts et des bas mais qui n’est jamais net, l’adepte de la boiterie voyageuse… et celui qu’on accuse parfois de faire du cinéma.

Parmi ces chevaux, on trouve un phénomène pas toujours très connu : la boiterie de compensation.

Imaginons un cheval qui a mal au postérieur droit à l’appui, quelle qu’en soit la raison.

Théoriquement, un cheval sain se repose en se mettant en appui sur un postérieur et en gardant l’autre soulevé. Il change régulièrement de côté, ce qui permet de reposer tantôt l’un tantôt l’autre.

S’il a mal à droite, il va soulever ce postérieur la majorité voire la totalité du temps. Le gauche ne va donc plus avoir son temps de repos.

Petit à petit, suite à vos soins attentifs, le postérieur droit va commencer à guérir et lui fera moins mal. Mais en attendant, le gauche très fortement sollicité est maintenant tout endolori et se met à faire mal à son tour de plus en plus. Le cheval se met donc à boiter à gauche.

On a donc le schéma suivant :

1. le cheval a mal à droite et il boite à droite. Vous soignez à droite.

2. le cheval a mal à droite et à gauche. Donc comme il boite autant à droite qu’à gauche, il ne « boite » plus mais est « simplement » raidouille, de mauvaise humeur, et renâcle à se déplacer. Mais parfois, cela s’arrange en chauffant et donc le cheval reprend une locomotion presque normale en tous cas à peu près symétrique. Vous êtes content parce que cela va mieux.

3. Si la douleur reste présente à droite, le cheval ne pourra pas soulager la gauche en faisant plus travailler la droite. Le postérieur gauche continuera à se dégrader. Le cheval a maintenant plus mal à gauche qu’à droite. Il se met à boiter à gauche. Vous soignez à gauche.

4. Néanmoins, le postérieur droit aura repris du service trop vite ce qui aura dépassé ses capacités de récupération. Après un temps de nouveau symétrique, la boiterie reviendra à droite.

Vous avez donc une boiterie voyageuse, intermittente. Si la cause de la boiterie initiale n’a pas été identifiée, elle peut perdurer et continuer à faire mal au cheval. Mais vous, gêné par la boiterie de compensation, vous soignez la boiterie de l’autre membre nettement plus visible. Vous vous attaquez à la conséquence et non à la cause qui est devenue invisible et forcément, les résultats sont médiocres.

Sans compter que je vous ai exposé le cas simple : un postérieur qui entraîne une compensation sur l’autre. Mais imaginez un problème plus subtil comme un coinçage de vertèbre, un problème aux antérieurs qui fait que le cheval vient plus dessous pour soutenir et fatigue des jarrets et vous aurez une idée de l’affolante variété des enchaînements possibles… et des raisons d’y perdre son latin.

A noter que les pieds sont le « deuxième cœur » et qu'il faut que le cheval ait des successions appui + lever pour faire marcher la pompe. Un pied qu’on soulage trop longtemps ou au contraire qu’on maintient trop longtemps en pression est néfaste à la circulation sanguine. Donc le cheval peut vous faire des poteaux qu’on peut prendre pour une cause de la gène des postérieurs alors que cela peut être la conséquence d’une souffrance aux antérieurs.

De même, dans le cas d’un cheval qui a par exemple un problème à un membre ce qui aura entraîné des problèmes musculaires ailleurs, la position antalgique qu'il choisira sera un compromis entre les différents problèmes. Donc elle sera moins « lisible » pour faire un diagnostic.

D’où la vieille habitude, lorsqu’on a un cheval qui a une boiterie dont la cause n’est pas évidente, de faire un tour complet du cheval.

Et aussi lorsqu’on a une boiterie évidente qui risque de durer un peu, d’aider les autres pieds par des bandes, des douches, de l’argile pour qu’ils puissent supporter le travail plus important qu’ils auront à fournir.

Et dans les cas graves, mettre un système de suspension au cheval pour limiter le poids à soutenir.

Catherine Kaeffer

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Cheval de trait. Techniques d'élevage. Tous droits réservés

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