Le son de blé est un faux pauvre
Le son de blé est souvent recommandé chez le cheval ou le poney trop gros ou sujet à la fourbure. Il est parfois considéré comme un aliment sans valeur nutritionnel servant juste de lest. Mais il est de fait un aliment contenant de l'amidon et qui ne doit pas être utilisé sans précautions. Techniques d'élevage fait le point.
Souvent, lorsqu’un cheval ou un poney doit avoir une ration très peu énergétique on préconise l’emploi de son de blé qui a la réputation d’être un aliment « pauvre ».
Bon, je ne vais pas brandir mon étendard et repartir en croisade. Vous savez ce que je pense des expressions un aliment « riche » ou un aliment « pauvre »…
Alors disons, sans barguigner que le son est un aliment pauvre… enfin, à tout prendre, c’est un faux pauvre, le genre qui se met un jean coupé acheté 300 euros pour avoir le look « pauvre ».
Notre son, c’est pareil. Comparons-le à une céréale comme l’avoine.
Au niveau énergétique, le son fait 0,85 UFC au kg, pour 0,87 pour l’avoine.
Au niveau protéique, il fait 75 g de MADC/kg contre 0,79 pour l’avoine… on est vraiment à touche-touche.
Alors parlons fibres puisque la publicité All Bran nous en fait des gorges chaudes : le son est à 9,2 % de cellulose brute et l’avoine à 12,2 %… c’est raté !
J’entends déjà les puristes (et les Canadiens) qui vont me dire que ce ne sont pas les mêmes fibres. Si on regarde les ADF (Acide Détergent Fiber = celles qui résistent à un détergent acide), il y en a 11,9 % dans le son et 14,9 % dans l’avoine… c’est encore raté.
Bon, alors d’où vient cette réputation ?
D’abord d’une teneur en amidon nettement moins importante que notre avoine : 19,8 % pour le son (tout de même) et 36,2 % pour l’avoine (mais 0 dans l’herbe tant qu’elle n’a pas épié). Cela veut dire que pour le même apport énergétique, si vous avez un cheval qui a des soucis avec l’amidon comme une insulino-résistance, des antécédents de fourbure ou un cushing, cela peut valoir le coup de remplacer une céréale par du son.
En fait, son excellente réputation vient surtout du monde des courses et des chevaux « échauffés à l’avoine ».
En effet, le son a la propriété d’être capable d’absorber son poids d’eau. Il permet donc s’il est mouillé, à poids égal d’en donner un volume important. Et comme souvent on raisonne par litre, un litre de son sec fait environ 250 g et qu’un litre d’avoine tourne autour des 450 grammes.
Alors, évidemment, si on remplace un litre d’avoine sec par un litre de son de surcroît mouillé, on diminue l’apport énergétique nettement.
Comme il peut absorber beaucoup d’eau, distribué à sec, il prédispose aux coliques gastriques, comme la pulpe de betterave non mouillée et pour les mêmes raisons. Il arrive dans l’estomac et il gonfle de façon importante ce qui provoque un « embouteillage » et une dilatation de l’estomac douloureuse.
Ces propriétés permettent de faciliter le transit chez le cheval non parce qu’il est riche en fibres car par rapport à un foin à 30 % de cellulose, c’est peanuts mais surtout parce qu’en capturant l’eau, il maintient une teneur en eau des crottins élevée.
La consommation limite est de 4 kg par jour pour un cheval de 500 kg mais on le donne très rarement à ces niveaux car il devient là franchement laxatif. En général, on ne dépasse pas 1 à 1,5 kg par jour ou 10 à 15 % de la ration.
Rappelons tout de même que sa forte teneur en phosphore (9,9 g/kg) et sa faible teneur en calcium (1,4 g/kg) fait qu’il a un rapport phosphocalcique très déséquilibré (Ca/P = 0,14). Pour rappel, selon les cas, on recherche en moyenne pour la ration entre 1,5 et 1,8.
Cela veut dire que du son donné régulièrement doit vous amener à corriger par apport de calcium. Sinon, les risques sont importants non seulement d’enthérolites (calculs intestinaux) mais d’ostéofibroses, maladie osseuse redoutable. Elle est aussi appelée d’ailleurs maladie de l’âne du meunier ou encore maladie du son…. Vous savez maintenant pourquoi !
Donc donner du son à un cheval qui est constipé par exemple du fait d’un transit paresseux ou d’un apport de concentré très important, peut être une excellente mesure.
En donner pour baisser la ration aussi, à condition de remplacer litre par litre. Le son n’est donc pas un aliment « pauvre », c’est un aliment « volumineux ».
Mais il faut ne donner que du son frais d’excellente qualité. En effet, comme il prend facilement l’humidité et qu’il a une grande surface exposée à l’air, il est très sensible au rancissement, aux fermentations et au développement de moisissures. Pas question donc de conserver votre son dans un coin de l’écurie et dans un sac pas impeccablement fermé.
Catherine Kaeffer
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MAJ Octobre 2021