Utilisation d’un foin chauffé : valeur alimentaire et qualité hygiénique
Nous avons détaillé le processus de fanage ainsi que les raisons qui font qu’un foin nouveau chauffe. Nous pouvons maintenant aborder les conséquences que ce chauffage du foin aura sur la qualité du produit fini.
L’origine de l’échauffement du foin est donc soit les dernières synthèses que peut faire la plante avant de mourir soit le développement des micro-organismes originaires de la plante et du sol et qui sont présents dans le foin. Le combustible qui permet cette production de chaleur, ce sont les constituants mêmes de la plante. Une montée en température s’accompagne donc toujours d’une perte de la valeur nutritive du foin que l’on obtiendra. Plus on monte en température plus cette perte sera importante.
D’un autre côté, l’élévation de température au-delà de 40°C provoque la réaction de Maillard : les protéines se lient aux fibres et deviennent de moins en moins digestibles.
Le préjudice sur les valeurs énergétique et protéique du foin dépend de la température maximale atteinte et, dans une moindre mesure, de la durée de l’échauffement.
Pour les bovins, on considère que :
- < 40°C : préjudice quasi imperceptible.
- 40 à 60°C : odeur de pomme pourrie, acide formique. Si l’échauffement s’en arrête là, le foin sera gris, poussiéreux. Cela se traduit par 5 à 15 % de pertes de valeur énergétique et 10 à 30 % de baisse de digestibilité des protéines.
- 60 à 80°C : foin de couleur brun/tabac /caramel. Les pertes sont alors comprises entre 15 et 30 % en valeur énergétique et de 30 à 80 % en digestibilité des protéines.
- 80 à 90°C : foin de couleur brun/café/noir. Le risque incendie est alors maximal.
Pour les équins, on peut estimer à mon sens que :
- < 40°C : on est sur un foin « normal ».
- 40 à 60°C : Plus que la perte des valeurs énergétique et protéique, le principal problème sera le côté poussiéreux du foin qui n'était pas suffisamment sec pour être stable et qui d'un autre côté n’aura pas été « stérilisé » par une montée en température importante. Ce type de foin peut engendrer ou aggraver des problèmes respiratoires.
- 60 à 80°C : Ce type de foin est très apprécié des chevaux du fait de son goût sucré. Il vaut donc mieux le donner petit à petit mélangé avec un foin non chauffé. Par contre, il ne vous donnera pas de soucis respiratoires. Donc à tout prendre, il vaut parfois mieux un foin de ce type qu’un foin un peu moins chauffé pour un cheval. Par contre, si vous avez des jeunes chevaux, des reproducteurs ou des vieux, il faut compenser la perte des apports protéiques.
- 80 à 90°C : À éviter à tout prix ne serait-ce que pour votre grange ou pour celle de votre fournisseur de foin.
Après échauffement, les résultats d’analyse de fourrage s’interprètent avec précaution. La baisse de digestibilité des protéines ne sera pas perçue par les analyses classiques. La protéine est bien présente dans le fourrage mais sa digestibilité est inférieure à celle indiquée sur le bulletin.
Au niveau sanitaire, je dirais que dans la zone 60-80°C, il y a très peu de risques. Ceci étant, si la grange n’a pas brûlé c’est que cette température n’a été atteinte qu’au cœur de la meule. Plus à l’extérieur, la température n’a pas monté autant et on se retrouve dans la zone 40-60 ° où là, le risque sanitaire est réel.
Les conséquences peuvent être multiples et parfois dramatiques. Dans les cas les moins graves, on peut avoir des allergies cutanées, respiratoires, oculaires ou digestives en présence de mycélium ou de spores. Le développement de moisissures peut produire des agents toxiques extrêmement variables en fonction de l’espèce et de la souche considérée. On cite dans la littérature :
- La maladie du trèfle moisi qui donne un syndrome hémorragique généralisé.
- Des agents infectieux responsables de mycoses pulmonaires (Aspergilllus fumigatus). Cet agent fréquemment rencontré dans les foins humides s’est parfois révélé responsable d’avortements après fixation placentaire chez les ruminants.
- Des agents de toxicoses (Aspergillus flavus). Ce sont généralement des moisissures qui prolifèrent sur les foins humides en libérant des substances toxiques (Aflatoxines par exemple).
- Des agents responsables d’allergies. Celles-ci sont provoquées par l’inhalation ou le simple contact de moisissures et éventuellement de bactéries comme dans le cas bien connu de la maladie du poumon du fermier.
Dans un prochain article, nous verrons les conséquences sur le temps d’attente nécessaire avant de distribuer le nouveau foin aux chevaux.
Catherine Kaeffer
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