Faire grossir une poulinière trop maigre, une question de timing

Publié le par Catherine Kaeffer. Editions Alpha et Oméga

Nous avons vu le cas de la poulinière trop grosse. Mais le cas inverse peut se produire. Une poulinière peut être maigre parce qu’elle a eu une précédente lactation fatigante, parce qu’elle a eu un problème de santé ou de nutrition précédent, ou comme on le voit parfois, certaines poulinières sensibles au transport, au changement de lieu et d’alimentation qui reviennent en mauvais état de leur passage à la saillie.

La raison doit être identifiée, éventuellement corrigée mais en tout état de cause, on se retrouve devant le problème qu’il faut qu’elle reprenne de l’état pour ne pas la pénaliser sur le long terme et ne pas pénaliser le poulain, actuel ou futur.

Là encore, on ne peut pas prendre le problème de la même façon en fonction du stade où on se trouve dans le cycle de reproduction.

Avant la saillie, pour optimiser les chances de réussite, il faut que la jument ait un poids stable ou mieux qu’elle soit en évolution ascendante. On peut donc commencer une suralimentation transitoire un à deux mois avant la saillie. Cette technique est appelée « flushing » et est d’autant plus efficace que la jument est maigre.

En tout état de cause, un déficit énergétique de 3 à 4 jours avant l’œstrus peut inhiber la fécondation en produisant un état hypoglycémique.

Attention aussi sur les juments très maigres, on peut avoir une hyperlipémie souvent subclinique c’est-à-dire sans symptômes visibles et une infiltration graisseuse dans l’ovaire qui inhibe l’aptitude à la reproduction.

C’est une époque de l’année où l’herbe est souvent de qualité médiocre, le foin de l’année dernière et où les températures peuvent être assez basses. La jument maigre doit être alimentée en tenant compte de tous ces facteurs. Donc au niveau énergétique on a :

Besoin d’entretien + besoin de récupération + besoin lié à la vie en plein air (s’il y a lieu) + besoin de croissance (si jeune) + besoin lié aux températures.

Inutile de vous dire que cela peut vite monter….

Une fois la jument confirmée pleine, il convient de faire un point sur son état et les kg qu’elle doit prendre. On peut ensuite estimer l’apport énergétique qu’il lui faudra en sus pour récupérer.

S’il est possible de le faire avant le 6ème mois de gestation, c’est toujours mieux. Cependant, il faut augmenter très progressivement les rations et surtout ne pas dépasser les capacités digestives de la jument qui sont forcément atteintes par cette maigreur. Par mesure de sécurité, je n’ajoute jamais plus de 1 UFC comme besoin de récupération. Cela permet d’apporter 30 UFC par mois en sus des besoins et donc d’espérer avoir un gain de poids de 11 kg par mois.

Une fois qu’on entre dans l’augmentation des besoins suite à la gestation, soit à partir du 6ème mois, j’ai tendance à alimenter comme si la jument était 1 mois plus tard soit l’alimenter au 7ème mois comme si elle était au 8ème. Cela a l’avantage de toucher tous les nutriments et donc de permettre une récupération globale.

Pour les juments maigres à l’approche de la mise-bas, une complémentation concentrée spéciale pour la préparation au poulinage prend tout son sens (Steaming-up). Elle se fait dans les toutes dernières semaines. Elle doit être progressive et modérée sur un plan quantitatif. Par contre, elle porte sur le qualitatif car elle doit compenser la chute terminale d’appétit en maintenant un bon état corporel. Elle stimule le développement fœtal assurant la naissance d’un poulain suffisamment mature et facilite la production de colostrum.

Si la jument arrive maigre en début de lactation, il faut lui réserver les meilleurs fourrages, un équilibre alimentaire au top, en suivant au plus près les besoins. Mais il ne faut pas non plus se bercer d’illusions. Si elle arrive maigre à la mise-bas, vous ne pourrez pas la remonter dans les 3 premiers mois de lactation. Si vous arrivez déjà à ce qu’elle ne perde pas de poids, vous aurez fait au mieux. Pour cela tous les coups sont permis. Si vous êtes en limite de digestion de l’amidon, vous recourrez à des corps gras. Vous fractionnez les repas. Vous portez une attention particulière à l’équilibre minéral…

Vous pourrez recommencer à reprendre l’affaire en main au moment de la décroissance de la production laitière vers le 3ème mois. Une façon simple de le faire est de « traîner les pieds » pour descendre la ration. Ainsi, vous conservez la ration 3ème mois pendant le 4ème. Vous descendez à la ration 4ème mois pendant le 5ème. Arrivé au 6ème, si la jument n’a pas récupéré, vous restez à une ration 5ème mois jusqu’à la fin de la lactation.

Là encore, c’est une œuvre de longue haleine mais qui permet d’une année sur l’autre d’avoir des résultats tangibles et surtout durables. Car mettre de la graisse sur une jument, c’est finalement assez rapide et facile. Mais lui faire récupérer des muscles, des os, des tendons, de l’état… du peps quoi, c’est autrement plus long.

Patience et longueur de temps…

Catherine Kaeffer

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Jument gestante. Techniques d'élevage. Image soumise à droits d'auteur

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