Remplacer une céréale par la pulpe de betterave déshydratée dans l’alimentation du cheval
Du fait du désamour des céréales, la pulpe de betterave déshydratée a le vent en poupe. A première vue, elle ne présente que des avantages : bonne conservation, bonne appétibilité, pas d’amidon, et un apport d’énergie relativement conséquent… et en plus elle est réputée faciliter la digestion.
Que demande le peuple ?
Mais comme vous le savez, la plus belle fille du monde ne peut vous donner que ce qu’elle a et notre pulpe de betterave n’est pas plus douée.
Alors, regardons-là dans le blanc des yeux avant de l’adopter (chiffres en % du produit brut).
La racine de la betterave est pressée pour récupérer le sucre. Le reste, la pulpe est déshydratée. Nous sommes donc en présence d’une racine ce qui explique une teneur en fibres élevée (17,3 %) alors que les céréales étant des graines, elles n’ont pas de tissu de soutien et donc une teneur en fibres faible (4,6 % pour de l’orge). C’est intéressant si nous sommes sur une ration peu encombrante ou un cheval à faibles besoins. C’est un point négatif si la ration est déjà très riche en foin ou en herbe, ou que le cheval a de forts besoins (jument allaitante) et/ou une faible capacité d’ingestion (poulain).
Parmi ces fibres, la betterave se caractérise par une teneur importante en pectines qui lui confère des propriétés hygroscopiques. Elle a tendance à se gonfler avec l’eau. C’est une des raisons pour lesquelles on préconise souvent de la faire gonfler avant distribution (l’autre étant que certaines présentations sont très dures à mâcher).
A doses modérées, les pulpes présentent l’avantage de contribuer à augmenter la teneur en eau des crottins. C’est donc intéressant pour les chevaux constipés ou brûlés à l’avoine.
Ce n’est pas une graine. La teneur en amidon est nulle. L’énergie est apportée par les sucres restants (6,6 %) et les fibres. Cette énergie est globalement inférieure d’environ 25 % à celle d’une céréale (0,76 UFC/kg) et comparable à celle du son. Elle est encore inférieure si on raisonne en litre réhydraté.
Elle est très riche en calcium 13,2 g/kg contre 0,7 pour de l’orge. Ce point limite leur utilisation dans la pratique avec les régimes riches en foin. En effet, le rapport phosphocalcique de la betterave est de 14,7. Celui du foin varie entre 1,5 et 2,5. Celui d’une céréale est d’environ 0,2. Or selon les chevaux, on recherche un rapport phosphocalcique entre 1,5 et 2.
Prenons un exemple. Si vous avez 10 kg de foin qui apportent 4,8 g de Ca et 2,7 g de P et 1,5 kg d’orge qui apporte 0,7 g de Ca et 3,4 g de P.
Pour l’ensemble de votre ration vous avez :
(4,8 g de Ca x 10 kg de foin) + (0,7 g de Ca x 1,5 kg d’orge) = 49 g de Ca
(2,7 g de P x 10 kg de foin) + (3,4 g de P x 1,5 kg d’orge) = 32 g de P
Votre rapport phosphocalcique est de 1,5 donc acceptable pour certains chevaux. Pour les autres, un CMV judicieusement choisi vous permet d’apporter un petit plus de calcium.
Si vous remplacez votre orge par des pulpes. Pour garder un apport énergétique constant, vous allez remplacer 1,5 kg d’orge par 2 kg de pulpes.
On a donc :
(4,8 g de Ca x 10 kg de foin) + (13,2 g de Ca x 2 kg de pulpe) = 74,4 g de Ca
(2,7 g de P x 10 kg de foin) + (0,9 g de P x 2 kg de pulpe) = 29 g de P
Votre rapport phosphocalcique est de 2,6.
Ce qui est au-dessus des préconisations et vraiment limite.
En outre, pour des raisons digestives, on recommande de ne jamais dépasser 2-3 kg par jour par cheval. Si pour une raison ou une autre, on devait monter la ration au-delà, les pulpes ne pourraient plus y suffire.
A noter que si l’association foin en grande quantité + pulpe est délicate, l’association foin de Crau ou de luzerne + pulpe est totalement à proscrire puisque le foin de Crau a un rapport phosphocalcique supérieur à 3 et que la luzerne va carrément flirter avec 5 !
Catherine Kaeffer
Cet article a été rédigé par l'équipe de Techniques d'élevage, pour découvrir d'autres articles et les services de notre équipe, rendez-vous surhttp://www.techniquesdelevage.frou http://anneetcat.wix.com/techniques-elevage.