La façon de caresser
Les mains dans les poches, espérant croiser des animaux, je flânais aux bords d'un pré. L'habitant des lieux, un âne entier et solitaire ne tarda pas à se montrer. Fronçant le nez, il m'indiqua rapidement que ce lieu duquel je m'approchais était son domaine. Je ne discute jamais sur ce point, il est normal qu'un animal se méfie des étrangers.
Sortant mes mains des poches, je me présentais à lui paumes ouvertes pour une inspection en règle. Il me huma à son gré puis chercha si je n'avais pas quelques friandises dans mes poches . Là-dessus, je l'écartais gentiment, ce qui le mit sur ses gardes. Un humain sans offrande ni intention, voilà qui n'est pas coutumier. Fronçant le nez, il revint à la charge. Je l'écartais à nouveau gentiment. Un claquement de dent me rappela qu'il était le maître des lieux. Je ne répondis pas, il avait le droit de me le dire, d'ailleurs, je n'avais aucune intention de rentrer. Je fis un pas en arrière, je baissais la tête, regardais le sol, mis les mains dans les poches et rentrais les épaules montrant que je n'avais pas envie de me battre et qu'il avait par avance gagné. L'âne me huma puis rassuré que nous soyons en accord sur sa position de maître des lieux, il retourna à ses occupations.
Je repris mes rêveries en le contemplant. C'était un bel âne et le seul fait de le voir évoluer était pour moi une joie. Je saluais donc ce nouvel ami en promettant de revenir lui rendre visite à l'occasion.
Je revins quelques jours plus tard. L'âne vint à ma rencontre et se montra moins méfiant que la fois précédente. Il réaffirma son statut et je le rassurais à nouveau sur mes opinions. Pour rien au monde, je n'aurais souhaité l'ennuyer et le seul fait qu'il accepte ma présence me suffisait. Les premiers instants passés, j'approchais ma main pour le remercier d'une caresse sur l'encolure. L'âne n'apprécia pas le geste et s'écarta en cherchant à me mordre, signe de sa désapprobation. Beaucoup auraient sévi à cet instant mais de quel droit aurais-je agi ainsi ? Après tout, nous ne nous connaissions que depuis peu. Je saluais donc l'âne en m'excusant de l'avoir dérangé.
Le lendemain, je me présentais à nouveau à la porte de son champ. L'âne leva la tête et lorsqu'il me reconnu repartit brouter. Je pris un moment pour en profiter puis je le laissais en le saluant comme à mon habitude.
La fois suivante, en me voyant, l'âne vint au trot, il était visiblement en forme. Nous avons échangé quelques politesses à distance puis voyant qu'il était «poussiéreux », je tentais quelques caresses de remerciement. L'âne ne les appréciant visiblement pas, je n'insistais pas et je m'excusais chaque fois que ma présence semblait le gêner un tant soit peu. De son côté, l'âne fit preuve de patience, le moment fut donc fort agréable pour nous deux.
Plusieurs fois nous avons partagé des moments. Juste un échange simple auquel nous prenions tous les deux plaisir.
Et puis un jour, c'est l'âne qui vint mettre la tête sous ma main. Je tentais alors une fois encore une caresse mais cette fois, je la fis douce. Je frôlais le poil au point de le lustrer en surface. Je pris le temps de regarder le sens de chaque poil et de le suivre sans influer sur sa position. L'âne ferma les yeux soufflant de contentement. Je souris, c'était donc cela qu'il souhaitait. Une caresse douce, sans appui, lente, très lente.
Depuis ce jour, l'âne arrive au galop pour « discuter » un peu avec l'humaine qui passe devant chez lui.
Anne Anta
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MAJ juuillet 2022