Utilisation de Miscanthus (Herbe à éléphant) pour l’alimentation des chevaux

Publié le par Catherine Kaeffer. Editions Alpha et Omega

Nous avons traité de la démarche à suivre pour utiliser un fourrage inhabituel pour l’alimentation des chevaux. Le Miscanthus est un exemple d’une espèce tropicale qui fait son apparition en France. Dans les cultures émergentes, le miscanthus fait figure d'espèce prometteuse et son utilisation est proposée à la fois comme litière et comme "foin" pour les chevaux. Techniques d'élevage fait le point.

Le Miscanthus est une graminée érigée, pérenne, allotétraploïde, sexuée et allogame. Il forme des touffes très denses à enracinement profond. Les cannes sont robustes et font plus de 2 mètres. Elles peuvent faire jusqu’à 3 cm de diamètre. Les feuilles font 2 à 4 cm de large pour 30 à 100 cm de longueur. C’est une plante pérenne.

Facteurs antinutritionnels et mécaniques

Je n'ai trouvé aucun essai sérieux sur les chevaux. On ne peut donc pas exclure la présence de facteurs antinutritionnels voire avec une toxicité chronique, relativement fréquents dans les espèces tropicales, ni de contaminations qui n’existeraient pas dans les conditions d’origine mais qui pourraient survenir chez nous. 

L'agressivité mécanique de la fibre dépend de la lignification de la plante et partant du stade de récolte. Ce point est important pour les chevaux à ulcères, ceux qui ont une dentition insuffisante ou qui ont souffert de coliques de stase.

Valeur énergétique et protéique

Comme beaucoup de graminées tropicales à fort développement et à pousse rapide, la valeur nutritionnelle du miscanthus décroît très fortement avec le stade de coupe.

  • A 19 jours : 0,67 UF et 205 g MAD / kg MS
  • A 28 jours : 0,54 UF et 111 g de MAD / kg MS
  • A 40 jours : 0,53 UF et 99 g MAD/ kg MS

(Roberge et al. 1985 sur cycle court)

Vous noterez qu’il s’agit là d’UF et de MAD, unités pour les ruminants et donc non directement applicables pour les chevaux.

Cette évolution rapide explique pourquoi on trouve des données présentant le miscanthus comme un fourrage bon ou acceptable et d’autres qui l’utilisent comme apport de fibres sur bovins avec une valeur nutritionnelle considérée comme nulle. Selon le mode de culture et le stade d’exploitation, on peut effectivement avoir l’une ou l’autre de ces situations.

Les taux de cellulose sur plante jeune (hauteur inférieure à 1,5 m) seraient de l’ordre de 20 à 22 % MS. Les chiffres sur ce point ne sont pas très cohérents. Cependant avec le vieillissement de la plante non seulement, il est logique que les teneurs en cellulose brute augmentent mais aussi la lignification entraînant logiquement une diminution de la dMO (digestibilité de la matière organique).

Valeurs minérales

Les teneurs en phosphore, potassium et calcium diminuent avec l’âge de la plante.

Mais là où il miscanthus va totalement à l’encontre de toutes nos habitudes en matière de fourrage, c’est au niveau des teneurs en calcium et en phosphore.

  • Calcium : 2,7 g/kg MS
  • Phosphore : 4,58 g /kg MS

Ce qui nous amène à un rapport phosphocalcique de 0,59 alors que nous avons l’habitude de fourrages qui ont des rapports phosphocalciques entre 1,5 et 3.

Cela signifie que si on utilise le miscanthus en fourrage exclusif sur un cheval à faibles besoins, on arrivera en quelques années, peut-être plus rapidement à des soucis osseux majeurs. On peut bien sûr le corriger mais cela exige que le cheval consomme une quantité importante de calcium et de phosphore en complément minéral. Ce ne sont pas des produits très bons à manger et sur ce type de chevaux, comme il y a peu voire pas d’aliment, il est difficile de les dissimuler dans autre chose.

Pour les chevaux à forts besoins, seule la variété jeune peut être utilisée en fourrage. Dans tous les cas, il est indispensable de faire faire une analyse complète après échantillonnage dans les règles de l’art sur les oligo-éléments et les vitamines.

Une attention particulière doit être portée sur le fer. En France, nous avons l’habitude de considérer que la carence en fer n’est pas à craindre. Ceci étant, une autre graminée tropicale, cultivée en Guyane sur des sols saturés en fer, le kikuyu a montré à l’analyse une teneur en fer extrêmement basse ne permettant plus la couverture des besoins des chevaux. Deux hypothèses : soit le fer est tellement captif dans le sol qu’il n’est plus disponible pour la plante et dans ce cas, la culture de la même plante dans nos conditions entraînerait une teneur en fer plus classique, soit la plante a développé des mécanismes lui permettant de ne pas absorber le fer.

Il résulte de ces observations qu’on ne peut pas utiliser les éventuels résultats d’analyse obtenus dans les conditions tropicales et d’autre part, qu’il faut faire sur ces produits des analyses bien plus poussées que pour un fourrage lambda.

Utilisation pour les chevaux

La première utilisation du miscanthus pour les chevaux est une utilisation en litière du fait de son bon pouvoir absorbant. Dans ce cas, il s’agit de plantes assez âgées.

Mais récemment, j’ai appris qu’il y avait sur le marché des offres de « foin de miscanthus ». Je suppose que dans ce cas, il s’agit de plantes plus jeunes encore que ce point soit à vérifier à chaque fois, les conditions de récolte n’étant pas aussi calibrées que pour une espèce traditionnelle. Dans ce cas, et compte tenu des éléments présents dans la littérature, il est plus que vraisemblable que le remplacement du foin de pré traditionnel par un foin de miscanthus entraînera la refonte totale de l’ensemble de la ration alimentaire avec changement d’aliment et de CMV.

Catherine Kaeffer

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MAJ juin 2022

Cheval. Techniques d'élevage (R) Tous droits réservés

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