Interprétation des résultats : gare à l’effet baguettes

Publié le par Catherine Kaeffer. Alpha et Oméga

Que ce soit dans un cadre strictement scientifique ou bien dans la vie courante, nous sommes tous amenés à interpréter des observations et à en tirer des conclusions pour améliorer nos pratiques.

Il existe un phénomène appelé de façon humoristique « l’effet baguettes » dont il convient de particulièrement se méfier.

La petite histoire qu’on raconte pour l’illustrer est la suivante :

Si vous recensez toutes les personnes qui mangent avec des baguettes par opposition aux inconditionnels de la fourchette et que vous cherchez à déterminer ce qui les amène à ce comportement en listant un certain nombre de leurs caractéristiques physiques, vous vous apercevez que majoritairement elles ont les cheveux noirs.

Une simple analyse en composantes principales vous amène à une conclusion évidente. La couleur des cheveux est nettement corrélée au fait de manger avec des baguettes. Ce sont donc deux phénomènes qui découlent l’un de l’autre. Le fait de manger avec des baguettes augmente fortement la probabilité d’avoir les cheveux noirs. L’usage des baguettes ferait-il noircir les cheveux ? Ou bien est-ce que les personnes qui ont les cheveux noirs auraient une dextérité particulière, un instinct obscur qui les pousse à se servir de baguettes ?

En fait, évidemment, les personnes mangeant avec des baguettes sont en majorité asiatiques et les asiatiques ont souvent les cheveux noirs. Il n’y a donc aucune relation entre la couleur des cheveux et la non-utilisation de la fourchette mais ces deux choses totalement indépendantes sont toutes deux reliées à une même situation géographique.

Elles peuvent donc apparaître faussement comme liées alors qu’elles ne le sont pas. C’est l’effet baguettes.

C’est un exemple absurde, allez-vous me dire. Oui, mais il cache sa part de vérité et on peut dans des circonstances moins évidentes se faire avoir très facilement par un effet baguettes.

Supposons que vous ayez un poulain qui présente un problème pathologique comme un wobler. Vous vous renseignez et vous apprenez que la sœur de ce poulain, un an plus vieille, présente le même problème. Vous en concluez aussitôt à un déterminisme génétique. C’est effectivement tout à fait possible. Mais ces deux poulains, à 1 an d’écart, ont été vraisemblablement élevés dans les mêmes conditions. Dès lors, comment faire la part entre l’apport génétique de la mère et le fait que les conditions d’élevage sont les mêmes d’une année sur l’autre ?… en fait, avec ces seules données, c’est impossible.

Dans l’autre sens, un éleveur sort régulièrement des chevaux de grande qualité qui brillent dans les concours. Vous en concluez qu’il a des souches exceptionnelles et que l’étalon maison a une génétique qui va sublimer celle de votre élevage. Mais en fait comment savoir si la souche est exceptionnelle ou si l’éleveur est un type de grande expérience, qui mène ses juments et ses poulains aux petits oignons, les bichonne et surtout a ce don qui permet de voir venir les problèmes et de les traiter avant qu’ils ne prennent de l’ampleur ?

Dès lors, si vous achetez une saillie de l’étalon maison, est-ce que vous allez récupérer une génétique extraordinaire qui va faire progresser votre élevage ou une bonne génétique certes mais qui n’a rien d’exceptionnel ? D’autre part, si vous confiez votre jument à ce type, est-ce qu’il n’arriverait pas avec une jument de bonne qualité mais sans plus, à vous sortir un poulain de tout premier ordre ? Bien sûr, on peut jouer sur les deux tableaux, mais si vous deviez choisir, sur lequel allez-vous miser ?

Subtilité du savoir-faire ou gènes performants ? 

Enfin, on entend dire que si les chevaux de trait ont souvent de mauvais pieds, c’est parce que certaines races ont été sélectionnées pour la production de viande et que de ce fait, on a privilégié les individus qui prenaient facilement du poids au détriment de ceux à ossature solide. Mais on pourrait tout aussi bien dire que ces éleveurs ayant eu pendant une bonne période comme débouché pour leurs animaux, la production de poulain de boucherie de 18 mois, leurs pratiques ont évolué pour privilégier la prise de muscle à la mise en place d’une ossature.

Évolution des races ou évolution des habitudes d’élevage ?

Relation de cause à effet ou simple effet baguettes ?

That is the question.

Catherine Kaeffer

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MAJ Août 2021

Cheval de CSI. Techniques d'élevage. Tous droits réservés

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