Comment estimer la durée de la transition nécessaire entre deux alimentations chez le cheval ?

Publié le par Catherine Kaeffer. Alpha et Oméga

Les aliments du cheval peuvent se regrouper en gros en :

1. Les fourrages. C’est l’herbe et ses dérivés comme le foin, l’enrubanné, les bouchons de foin et les granulés de luzerne ainsi que la paille.

2. Les concentrés, ainsi nommés parce qu’ils apportent une énergie importante sous un faible volume. Ce sont les céréales (blé, épeautre, orge, avoine, maïs, riz…) et leurs dérivés comme les sons, les graines oléagineuses ou oléo-protéagineux (lin, soja, tournesol, pois, féverole…) et pour certaines leurs dérivés que sont les tourteaux et les huiles.

Pour déterminer le temps de la transition nécessaire pour passer d’un régime A à un régime B, il importe de bien déterminer l’ampleur du changement et surtout sa nature.

Évidemment s’il s’agit de rajouter une poignée de concentré en moins ou une brassée de foin en plus, vous pouvez le faire sans barguigner d’un jour sur l’autre.

Mais si la modification est plus conséquente, vous devez vous poser la question de savoir comment la ration A est digérée et comment le sera la B. Et donc au préalable déterminer ce que votre changement entraînera dans la modification de la composition chimique globale de votre ration.

Passer d’un foin à un autre du même type ne posera pas de problème particulier. De même si vous modifiez un peu les proportions d’un mélange de céréales, le cheval ne vous en tiendra pas rigueur. Tout cela parce que vous n’aurez pas fondamentalement changé le type de molécules qui arriveront dans le tube digestif et partant la façon dont elles seront digérées.

Il y a deux grands sites de digestion : l’intestin grêle et le gros intestin.

Dans l’intestin grêle la digestion se fait par voie enzymatique. Elle touche les protéines, les sucres et amidon, les lipides. Chaque type de nutriment correspond à un type d’enzyme. Il faut 5 jours pour adapter les enzymes à la nouvelle donne dans le cadre d’un changement d’une importance moyenne.

Dans le gros intestin la digestion se fait par voie microbienne. Elle concerne principalement la cellulose (les fibres) mais aussi le reliquat d’amidon et de protéines qui a échappé à la digestion enzymatique de l’intestin grêle. Il faut minimum 10 jours pour adapter la population bactérienne.

Prenons quelques exemples pratiques pour illustrer mon propos :

Votre cheval reçoit une bonne quantité de foin et environ 2 kg par jour d’un mélange de céréales (donc une digestion via l’amylase). Vous souhaitez le passer à un aliment aussi énergétique mais sans céréales. Il apporte son énergie par la voie des fibres et des graisses. Les fibres ne vont pas vous poser de problèmes puisqu’elles seront digérées comme le foin qu’il a déjà. Modification faible. Par contre, vous aviez une digestion de l’amidon des céréales dans l’intestin grêle par l’amylase et vous passez à une digestion des lipides toujours dans l’intestin grêle mais par une lipase. Le site est le même mais les enzymes concernées non. Transition de 5 jours minimum.

Vous récupérez un cheval qui sort de l’entraînement et vous souhaitez en faire un cheval de loisir. A l’entraînement, il recevait du foin en quantité très limitée et 5 kg de céréales par jour. Comme il va beaucoup moins travailler, vous souhaitez le passer au foin majoritaire. Si cette transition est faite du jour au lendemain, vous risquez que le foin soit mal digéré. Les bactéries spécialisées dans la digestion de l’amidon résiduel sont nombreuses alors que celles spécialisées dans la digestion des fibres sont présentes mais en moindre concentration. La digestion des fibres sera donc anormalement longue et vous risquez une colique de stase. Il faut donc adapter ces bactéries. Je dirais donc 10 jours minimum et si vous couplez cela avec un changement d’environnement, un cheval stressé, une mise au repos, comptez 20 jours.

Cas particuliers :

Le cheval en question a des antécédents de colique de stase ou des mélanomes : descendez tranquillement à raison de 1 kg par semaine.

S’il était sur litière non labile comme des copeaux de bois et que vous le passez sur litière paille, différez un peu si possible votre transition car il risque fort de se régaler avec la paille. Si vous ne pouvez pas le faire, maintenez-le sur litière non consommable pendant la transition puis ensuite seulement proposez-lui de la paille pendant une semaine avant de le mettre définitivement sur la nouvelle litière.

Si vous avez affaire à un jeune cheval, multipliez les temps de transition normaux par 2.

Si vous avez un vieux cheval en bonne santé, prévoyez un temps de transition normal pour une augmentation de l’apport en concentré. Par contre, multipliez par 2 votre temps pour une augmentation du fourrage. En effet, la digestion est toujours plus lente du fait d’un péristaltisme moins efficace chez le vieux cheval. Vous avez toujours un risque de mélanome. Et le broyage par les dents est généralement moins efficace.

Pour les chevaux dénutris, les convalescents, les transitions doivent se faire chaque jour un peu et très progressivement en observant les réactions du cheval. Dans ce cas, pas de norme. Il faut s’adapter à chaque cas.

Catherine Kaeffer

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Balle d'enrubanné. Techniques d'élevage. Tous droits réservés

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