Corriger les conséquences d’une carence nutritionnelle

Que ce soit suite à un bilan sanguin ou à un bilan nutritionnel, lorsqu’une carence est mise en évidence, il peut sembler simple de la corriger. Il manque d’un élément, on va en ajouter et le problème sera réglé. Oui… enfin, pas exactement. Techniques d'élevage fait le point.

Je ne vais pas me lancer aujourd’hui sur la distinction classique entre carence primaire et carence secondaire, dont nous avons déjà parlé dans d’autres articles.

Je ne vais pas non plus m’attarder sur les différences qu’il y a entre le taux sanguin d’un élément et la réalité d’une carence. Là encore nous avons déjà abordé ce point dans un autre article.

Je vais plutôt focaliser mon propos sur la correction de la carence.

Supposons que l’élément carencé est bien identifié et que l’interprétation du bilan nutritionnel et/ou sanguin est sans appel. Il nous reste à savoir si le fait de corriger la carence va ipso facto, en éliminer l’effet.

Cela dépend de la situation. En fait, c’est un problème d’horloge interne.

Supposons un cheval adulte qu’une carence alimentaire a fait démuscler. Le muscle, comme vous le savez contient dans chaque faisceau des cellules totipotentes (autrement dit des cellules qui peuvent tout faire), des cellules souches.

Le muscle a fortement régressé, mais vous avez des cellules qui peuvent le reconstruire, si vous leur donnez les moyens de leur politique. Donc un cheval peut remuscler quel que soit son âge, même s’il est très âgé, il a conservé les moyens de le faire. Bon forcément, plus il est âgé moins cela sera rapide mais cela reste possible.

Supposons maintenant une fonction, une construction très liée à l’horloge interne pour son développement. On peut en citer beaucoup comme la croissance osseuse, mais aussi le développement du cerveau, des organes des sens etc. Pour ça, avant l’heure c’est pas l’heure, après l’heure, c’est trop tard !

Si au moment de la mise en place de cette structure, au moment où ce développement doit se faire, l’organisme est carencé et ne peut le faire correctement, cette structure sera montée de bric et de broc ou pas montée du tout. Un cartilage de conjugaison, c’est présent pendant un certain temps et cela disparaît progressivement. A un instant t, le rattrapage possible est fonction de la quantité de cartilage qu’il vous reste, de la capacité restante de l’organisme à créer la structure.

Dans le cerveau aussi, les structures doivent se mettre en place et apprendre à fonctionner. Si on a une privation sensorielle chez le jeune, la fonction qui correspond peut tout simplement ne pas se développer. Ce n’est pas forcément rattrapable.

Pour certaines fonctions, on a une tolérance assez importante. Ainsi on peut avoir une croissance compensatrice pendant des années. Mais elle n’est pas infinie. Un cheval qui n’a pas fait sa dernière phase de croissance à 12 ans, il a ossifié, c’est foutu, il ne la fera jamais.

Mais un poulain dont la mère en mauvais état ou malade n’a pas assuré correctement le développement in utero, pourra ne jamais s’en remettre totalement voire ne pas s’en remettre du tout et mourir prématurément parce qu’il aura été mal « fabriqué ».

Un jeune cheval qui du fait d’une carence en cuivre fait une OCD, bien sûr on peut l’opérer mais il restera avec des cartilages plus fragiles qu’un autre.

Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas corriger la carence car bien sûr, plus elle se prolonge dans le temps, plus elle sera délétère. Mais cela veut dire que la correction de la carence identifiée permet de résoudre le problème dans certains cas mais pas dans d’autres.

Catherine Kaeffer

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MAJ août 2024