Valeur nutritionnelle des aliments selon leur richesse en fibres
Certaines caractéristiques présentes sur l’étiquette d’un aliment sont obtenues par simple analyse du produit. C’est le cas de la teneur en protéines, en cellulose, en matières grasses ou en matières minérales.
D’autres résultent d’un calcul à partir des résultats de l’analyse. C’est le cas de la valeur énergétique du produit (UFC = Unités Fourragères Cheval) ou bien des MADC (Matières azotées digestibles par le cheval). Ces deux éléments permettent à leur tour de calculer le célèbre rapport protidoénergétique qui est une caractéristique essentielle d’un aliment. Autrement dit le rapport entre les protéines et l’énergie ou le nombre de grammes de matière azotée digestible par le cheval que vous apporterez à chaque fois que vous apporterez 1 UFC.
Pour un aliment, on prend donc les résultats de l’analyse et grâce aux équations établies par l’INRA en 1994, on calcule sa valeur énergétique et protéique.
1994… c’est bien là que le bât blesse.
Certes 1994, ce n’est quand même pas la préhistoire. En 1994, l’orge était bien de l’orge, le maïs du maïs et le foin du foin.
Donc pour les produits simples, pas de souci particulier, cela marche.
Pour les aliments composés, c’est une toute autre histoire. Vous ou moi, nous ne connaissons le plus souvent pas la composition exacte de l’aliment. Donc l’INRA a récupéré une gamme d’aliments composés avec l’ensemble des formules complètes et a fait l’analyse chimique de ces aliments. Il a ensuite établi des équations permettant à partir d’une analyse chimique de déterminer les valeurs énergétiques et protéiques.
Ces équations marchent bien lorsqu’elles sont utilisées dans des situations proches de celles qui ont servi à leur établissement… donc les aliments « classiques ».
Mais en 1994, les aliments riches en fibres, on ne connaissait pas. Donc ces aliments n’ont pas pu être pris en compte dans l’établissement de ces équations. Cela amène quelques questions pour le moins dérangeantes.
Est-ce qu’une équation établie sur des aliments à 10 % de fibres, s’applique telle qu’elle à un qui est à 25 % ? Tout laisse à penser que non. En effet, un fait est connu en zootechnie est que plus vous augmentez la teneur en cellulose, plus vous diminuez la digestibilité. La valeur énergétique du produit s’en trouve affectée au-delà de l’impact direct de la moindre digestibilité de la cellulose. En effet, la cellulose se trouve dans les parois des cellules végétales. Plus elle est abondante, moins elle est digestible, plus elle va « protéger » d’autres composants qui sont à l’intérieur de la cellule des attaques enzymatiques. Ils ne pourront donc être digérés que plus loin dans le tube digestif, lorsque les bactéries cellulolytiques auront fait leur œuvre et les auront « libérés ». Plus loin avec forcément un moindre rendement. Plus loin voire pas du tout car on est à ce moment-là très proche de la sortie et qu’une partie pourrait ne pas être récupérée.
Pour certains produits qui sont de fait des foins en bouchon, il est possible de les considérer comme des foins avec séchage en grange et de leur appliquer les équations correspondantes pour être plus proche de la réalité. Mais lorsque vous ajoutez des graisses, des ingrédients divers et variés parfois de façon importante, vous vous retrouvez avec un produit qui est un intermédiaire entre un fourrage et un concentré, un hybride entre les deux. Et dans ce cas, vous n’avez aucune certitude sur l’équation qui va s’avérer la plus juste… ou la moins fausse.
Je vous entends déjà me dire qu’il faut arrêter de se prendre le chou sur tout et n’importe quoi et qu’il y a qu’à demander au fabricant les valeurs. Sauf que ces valeurs, il les aura obtenues comment ? En reprenant l’ensemble de la formule et en faisant une moyenne pondérée entre les différents ingrédients ou en appliquant les formules INRA ? Mystère et boule de gomme.
Ce qui me fait me poser cette question, ce sont les chiffres parfois mirobolants qu’on peut trouver pour le rapport protidoénergétique de ce type de produit. Alors certes, un bon séchage en grange sur une herbe de qualité, cela peut faire des merveilles, mais si on rajoute beaucoup d’huile, beaucoup de sources de fibres pauvres, j’ai un peu du mal à comprendre comment on peut aboutir à un produit qu’il faudrait même utiliser avec les plus grandes précautions tellement le rapport protidoénergétique est dans la stratosphère.
Alors parfois, je m’interroge, voire je doute…
Catherine Kaeffer
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