La fourbure de pâturage : variation de la teneur en fructanes de l'herbe
Nous avons vu dans un article précédent, l'importance des fructanes et leur variation au cours de l'année, je n'y reviendrai pas.
Au cours de la journée, on a aussi des variations :
Dès que le soleil se lève, la photosynthèse commence. En fin d'après-midi, la plante a une journée de production derrière elle... elle est chargée à bloc.
A contrario, pendant la nuit, pas de soleil (bonjour Monsieur de La Palisse) donc pas de photosynthèse, mais respiration, croissance, donc le taux de fructanes descend.
Au niveau de la journée, la valeur de l'ensemble sucres simples + fructanes peut doubler en l'espace de quelques heures passant de 160 à 240 g par kg de MS.
Et suivant le stade de croissance de la plante ?
Une plante très jeune est pauvre en fructanes parce que sa croissance est importante et sa surface foliaire donc ses capacités de photosynthèse sont faibles.
Lors de la croissance de la tige, suivie de la floraison, productions finalement peu exigeantes pour la plante, les fructanes s'accumulent. D'autant que c'est un stade où, le plus souvent, la plante a beaucoup de feuilles vertes, donc la capacité de photosynthèse est importante et la production de fructanes qui va avec. Si la croissance n'est pas suffisamment soutenue, le risque d'accumulation est d'autant plus grand.
Lorsque le grain se développe, la synthèse de fructanes est active mais les besoins sont tellement importants pour la production de l'amidon du grain que les concentrations en fructanes diminuent (toujours notre problème de robinet). Pour les céréales qui ont un gros grain, cela entraîne la quasi disparition des fructanes dans la tige.
Les conditions de gestion du pâturage sont aussi à considérer :
Dans le monde du cheval et surtout du poney, on accuse souvent les prairies trop « riches » de provoquer des fourbures. Certes, un poney rond comme un tonneau parce qu'il se goinfre toute l'année ronde à s'en faire péter la sous-ventrière, est un candidat idéal.
Parmi les graminées semées, certaines ont tendance à accumuler très facilement des fructanes. Par ordre décroissant, on distingue : le ray-grass anglais, la fléole des prés, la fétuque élevée, le dactyle aggloméré, l’agrostis solonifère, le vulpin des prés, le pâturin et le brome.
Alors vive les prairies naturelles ?
Euh... oui et non.
Question flore, elles contiennent des plantes résistantes à la sécheresse comme au froid qui sont les championnes de l'accumulation des sucres comme le pissenlit, la folle avoine, le plantain, ou la chicoré. Il est à remarquer que le plantain est une plante connue pour être la dernière plante encore verte en cas de sécheresse alors que toute l'herbe alentour est morte... les fructanes sont protecteurs, ceci explique cela.
Et puis qui dit « naturelles » veut souvent dire sans apport de fertilisants. Pas de fertilisation raisonnée égale carences diverses et pousse moins rapide. Or, les légumineuses et graminées carencées en azote et en phosphore accumulent des glucides non structuraux bien plus qu'avec une fertilisation optimale. Bref, on a le sentiment de donner une herbe moins riche alors qu'elle aura un « risque fourbure » plus important.
Évidemment les sols salés qui créent des conditions similaires à une sécheresse, provoquent aussi des accumulations de fructanes.
Vient ensuite la délicate question de la hauteur de l'herbe !
Les chevaux sont aptes, c'est connu, à utiliser correctement les pâturages ras. Ils sont adaptés pour ça. Or, les fructanes sont stockés dans les tiges et plus particulièrement à la base de celle-ci.
Donc, plus vous amènerez votre cheval à pâturer ras, plus il aura de chances de consommer des fructanes.
Une technique souvent employée pour les poneys sensibles à la fourbure est de faucher la parcelle pour faire le foin et de mettre les poneys dedans ensuite. Deux cas de figure :
La fauche a été faite sur une herbe épiée. L'épi a consommé les réserves de la plante. Les poneys ne risquent pas grand chose.
La fauche a été faite au moment où l'herbe commence à ralentir sa croissance et où elle se prépare pour son épi. Il y a beaucoup de fructanes dans la plante et ils sont majoritairement dans la base de la tige. Vos poneys pourront courir un risque en consommant les restes de fauche.
Et pour les foins ?
La quantité de glucides non structuraux est légèrement plus élevée dans l'herbe que dans le foin qu'on fait avec car lors du processus de fanage, les plantes coupées continuent à respirer et donc à utiliser des glucides. Un foin fané par beau temps, qui donc séchera vite aura plus de fructanes à quantité égale au départ qu'un foin séché par temps couvert.
Pour le foin, les fructanes peuvent atteindre 15 à 60 g par kg de MS, l'herbe de première coupe présentant les concentrations les plus élevées surtout si elle n'a pas été laissée aller à l'épiaison.
A noter que les légumineuses stockent préférentiellement de l'amidon plutôt que des fructanes. Donc pourquoi pas en très faibles quantités ? La question est très controversée.
Les foins d'orge d'avoine ou de blé sont plus riches en fructanes que les foins « normaux ». Ce sont en effet des plantes qui suite à la sélection, sont capables de stocker de façon efficace l'énergie nécessaire à l'élaboration d'un grain important.
Bon, je vous entends soupirer, c'est loin d'être évident tous ces facteurs de variation qui vont dans tous les sens... de quoi y perdre son latin. Alors dans un prochain article, je vous proposerai une stratégie de gestion du pâturage – presque – simple pour un cheval sujet à la fourbure.
Catherine Kaeffer
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